Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/459

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ments étrangers et compromettants pour leur pureté. Dans le dessein précisément de les accréditer promptement auprès des Gentils, il s’est permis d’amalgamer ces principes avec des erreurs païennes, et, de ce travail de retouche et de remaniement, il est résulté dans la doctrine chrétienne un tout, moitié fidèle à la religion-mère, moitié conforme aux opinions enracinées de date ancienne chez les néophytes venus du Paganisme. Ainsi il lui est arrivé pour la concession du culte des images, et ainsi aussi pour l’enseignement relatif à la création du monde. Je reconnais bien encore, si vous voulez, le Dieu-Créateur tel que le représente le Pentateuque, quand je lis dans l’Évangile selon Matthieu ces paroles : « Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre[1] », et que, dans les Actes des Apôtres, je le vois qualifié de « Dieu vivant qui a fait le ciel et la terre, la mer et toutes les choses qui y sont[2]. » Mais je ne le reconnais plus dans le discours rapporté par Jean et où Jésus dit « Tout ce que le Père fait, le Fils le fait pareillement. Car comme le Père ressuscite les morts et donne la vie, le Fils donne la vie à ceux à qui il veut. Le Père ne juge personne, mais il donne au Fils tout pouvoir de juger[3]. »

Qu’est-ce que ce Dieu-père qui délègue au Dieu-fils tous ses pouvoirs et qui, quoique Juge suprême, ne juge point et commet à un autre le soin de distribuer la vie aux mortels ? Ce que nous en savons le mieux, c’est qu’à coup sûr ce n’est plus là le Dieu-un des Écritures « qui juge la terre[4], frappe et guérit, élève et abaisse et cela toujours de ses propres mains[5] ».

Je reconnais de nouveau le Dieu du Pentateuque quand je vois

  1. Matth., chap. XI, v. 25.
  2. Actes des Apôtres, chap. XIV, v. 15.
  3. Jean, chap. V, v. 19, 21 et 22.
  4. Genèse, chap. XXVIII, v. 25.
  5. Samuel, chap. III, v. 6 et 7.