Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/462

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tisme comme dans le Christianisme, la bonté, la clémence et la miséricorde de Dieu. En quoi cette bonté, cette clémence et cette miséricorde peuvent-elles profiter à des hommes à qui on n’accorde point la liberté et qui s’avancent sous l’impulsion d’une volonté supérieure, véritable destin pour Mahomet, inéluctable prédestination suivant Jésus ? Et puis, l’un et l’autre de ces fondateurs de religion ne considèrent-ils pas aussi les hommes comme gâtés dans leur origine, entachés dès leur naissance du germe corrompu du péché d’Adam et, par suite, incapables de s’élever à une certaine hauteur morale sans une grâce spéciale résultant d’une foi particulière, ici la foi en Jésus comme rédempteur du genre humain, là la foi en Mahomet ? Et sans ces deux croyances exclusives, plus de salut à espérer !

Que nous avons trouvé le Judaïsme plus large et plus rationnel, quand nous avons constaté qu’à ses yeux l’homme, abstraction faite de toute croyance spéciale, de toute foi particulière et exclusive, est presque un dieu sur la terre, tant il lui accorde de liberté, d’intelligence et de perfection native, et tant il déclare son âme pure de naissance avant que le vice ne vienne la souiller et la flétrir ! Car, voici ce que le Judaïsme enseigne : dans chaque homme qui naît au sein de quelque religion que ce soit, Dieu réalise la créature la plus parfaite qui puisse exister sur la terre. A cet effet, il la dote d’une partie de ses propres attributs et lui départit toutes les plus excellentes dispositions de cœur et d’esprit. Ainsi il a agi avec Adam, ainsi il agit tous les jours encore avec tous les Membres du genre humain, sans distinction de race ni de culte. Il désire que tous deviennent heureux par la vertu, et, avec l’intelligence, le sentiment et la volonté, il leur donne en main la clé du bonheur[1].

  1. Voir Joël, chap. III. v. 1.