Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/85

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plus bas, le partage se fera toujours dans les mêmes proportions.

Ainsi, ce nouveau système, imaginé par M. Ricardo, et qui a été embrassé par M. Malthus et quelques autres écrivains modernes, qui suppose que le prix du blé sur le marché dépend de la nature plus ou moins fertile, plus ou moins améliorée de la terre sur laquelle a été recueilli le blé vendu, est totalement opposé à ce que Smith enseigne et à ce que la raison nous démontre. Or, dans un système d’économie politique, toutes les vérités s’enchaînent les unes aux autres, et le principe qui règle le prix du blé en argent forme un anneau si important dans cette chaîne de déductions et de conséquences, qu’on ne peut pas le déplacer sans mettre en désordre tous les rapports des valeurs et sans détruire tout le système. Ainsi, ceux qui se permettent de porter ainsi une main destructrice sur l’édifice construit par Adam Smith, s’imposent dès lors la tâche d’en recomposer un autre, et il semble que MM. Ricardo et Malthus sont encore fort loin de remplir cette tâche.

Si l’homme a produit du blé au delà de ce qui était nécessaire pour sa propre subsistance, c’était pour employer ce surplus disponible à nourrir d’autres hommes qui travailleraient pour lui ou qui lui consacreraient leur temps et leurs services. Dans les temps du moyen âge, le grand propriétaire nourrissait un nombreux train de domestiques et de vassaux pour le servir dans la paix et à la guerre. De nos jours, il emploie la plus grande partie des subsistances dont il dispose, à commander du travail aux ouvriers des manufactures. Ainsi, dans toutes les périodes de la société, c’est en travail que la subsistance a été payée, et elle a dû recevoir de ce travail une quantité égale à celle qu’elle pouvait faire subsister ; car si la masse de la subsistance destinée au travail d’autrui eût excédé la somme du travail qui s’offrait en échange de la subsistance, cette quantité surabondante de subsistance n’aurait plus été produite, le propriétaire de terre n’ayant plus aucun intérêt à continuer cette production. D’un autre côté, quelque nombreuse que l’on puisse supposer la population indigente qui offre son travail et ses services en échange de subsistance, elle ne peut pas en recevoir moins qu’il ne lui en faut pour subsister, attendu que, par le seul effet des lois de la nature, cette population descendrait bientôt au niveau de la quantité de subsistance capable de l’alimenter.

Smith a donc été bien fondé à dire : « La nature des choses a im-