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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/101

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gés, s’il n’y a peut-être pas moyen de corriger ce vice, au moins est-il bien facile d’empêcher qu’il ne puisse troubler la tranquillité de personne, si ce n’est de ceux qui en sont possédés[1].

Il n’y a pas de doute que c’est l’esprit de monopole qui, dans l’origine, a inventé et propagé cette doctrine, et ceux qui la prêchèrent les premiers ne furent certainement pas aussi sots que ceux qui y crurent. En tout pays, l’intérêt de la masse du peuple est toujours et doit être nécessairement d’acheter tout ce dont elle a besoin, près de ceux qui le vendent à meilleur marché. La proposition est d’une évidence si frappante, qu’il paraîtrait ridicule de prendre la peine de la démontrer, et si les arguties intéressées des marchands et des manufacturiers n’étaient pas venues à bout d’embrouiller les idées les plus simples, elle n’aurait jamais été mise en question ; leur intérêt à cet égard est directement opposé à celui de la masse du peuple. Comme l’intérêt des maîtres qui composent un corps de métier consiste à empêcher le reste des habitants d’employer d’autres ouvriers qu’eux, de même l’intérêt des marchands et des manufacturiers de tout pays consiste à s’assurer le monopole du marché intérieur ; de là ces droits extraordinai-

  1. Les marchands ont aujourd’hui des vues plus libérales et plus larges, et en même temps plus exactes de leurs véritables intérêts. Nous en trouvons la preuve dans cette fameuse pétition signée par les premiers marchands de Londres, et soumise à la Chambre des communes en 1820. Elle reconnaît de la manière la plus évidente les avantages supérieurs d’une concurrence sans entraves, et elle demande le rappel de toutes les prohibitions et règlements qui ont pour objet de protéger l’industrie nationale, et non de créer un revenu à l’État. La présentation d’une pétition semblable signale une ère nouvelle dans l’histoire du commerce, car elle nous fait voir qu’il n’existe plus désormais de désaccord sur ce sujet entre les idées des théoriciens rationnels, et les hommes pratiques les plus intelligents*.
    Mac Culloch.

    *. Comme toujours, le commentateur voit les choses sous une trop flatteuse apparence. De grands négociants sont facilement partisans de la liberté du commerce, parce qu’ils espèrent en profiter pour négocier plus d’affaires. Mais les producteurs protégés par des droits exagérés ou des prohibitions ne font pas, que nous sachions, des pétitions en faveur de la liberté du commerce, pas plus en Angleterre qu’en France. La Grande-Bretagne se prépare en ce moment (1842) à réduire un grand nombre d’articles de son tarif de douanes, et son parlement est assailli par une multitude de pétitions qui ne ressemblent en rien à la fameuse pétition des négociants de Londres en 1820.

    A. B.