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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/125

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elle, et par conséquent elle tend doublement à donner à leur industrie de l’avantage sur la nôtre[1].

Comme la prime fait monter sur le marché intérieur, non pas le prix réel, mais simplement le prix nominal de notre blé ; comme elle augmente, non pas la quantité de travail qu’une certaine quantité de blé peut entretenir et mettre en activité, mais simplement la quantité d’argent que cette quantité de blé pourra obtenir en échange, elle décourage nos manufactures, sans rendre le moindre service réel à nos fermiers ni à nos propriétaires ruraux. Elle met bien, à la vérité, un peu plus d’argent dans la poche des uns et des autres, et ce ne serait peut-être pas chose facile à faire entendre à la majeure partie d’entre eux, que ce n’est pas là leur rendre un service très-réel. Mais cependant, si cet argent baisse dans sa valeur, s’il perd du côté de la quantité de travail, de vivres et d’autres marchandises nationales de toute espèce qu’il a la faculté d’acheter, autant qu’il augmente lui-même en quantité, alors le service ne sera guère que nominal et imaginaire.

Il n’y a peut-être dans l’État qu’une seule classe de gens pour qui la prime est ou serait réellement profitable. C’est celle des marchands de blé, de ceux qui exportent et importent les blés. Dans les années d’abondance, la prime a nécessairement occasion­né une plus forte exportation que celle qui aurait eu lieu sans cela ; et en empêchant que l’abondance d’une année ne servît à soulager la disette de l’autre, elle a occasion­né, dans les mauvaises années, une importation plus forte que celle qui eût été néces­saire sans cette institution. Dans les deux cas, la prime a donné plus d’occupa­tion aux marchands de blé, et dans les années de cherté, non-seulement elle les a mis dans le cas d’importer une plus grande quantité, mais encore de vendre à un meilleur prix et, par conséquent, avec de plus gros profits qu’ils n’eussent pu le faire si le pro­duit surabondant d’une année n’eût pas été plus ou moins détourné de venir suppléer au déficit d’une autre. Aussi est-ce dans cette classe de gens que j’ai remarqué la plus grande chaleur pour le renouvellement ou la continuation de la prime[2].

  1. La prime ne tend qu’à abaisser les profits, mais non à élever le prix d’aucune autre denrée excepté le blé. Mac Culloch.
  2. Le marchand de grains peut profiler de cette prime d’une manière indirecte, mais le bénéfice du propriétaire des terres est direct et clair ; et si le docteur Smith avait mieux observé, il aurait vu que ce sont principalement les propriétaires des campagnes qui sont les véritables soutiens de tout genre de prime et de monopole pour favoriser la vente de leurs produits. Buchanan.