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excusable. Si jamais l’exportation du blé devait être défendue, le prix auquel elle pourrait l’être devrait toujours être un prix très-élevé.

Les lois relatives au blé peuvent généralement être comparées aux lois relatives à la religion ; le peuple a un sentiment si fort de son intérêt personnel dans les matières qui touchent à sa subsistance dans cette vie, ou à son bonheur dans une vie future, que le gouvernement est forcé de se plier à ses préjugés et d’établir, pour maintenir la tranquillité publique, un système conforme aux idées populaires. C’est peut-être pour cette raison que, sur l’un ou sur l’autre de ces deux objets capitaux, il est si rare de trouver un système qui soit raisonnable.


§ IV. — Commerce de transport.


Le commerce du marchand voiturier ou de celui qui importe du blé étranger pour réexporter, contribue à assurer l’abondance sur le marché national. À la vérité, ce n’est pas sur ce marché sur le marchand se propose de vendre son blé ; toutefois, il sera généralement disposé à l’y vendre, et même un peu au-dessous de ce qu’il espère en trouver sur le marché étranger, parce qu’il s’épargnera ainsi les dépenses du chargement et du déchargement, celles du fret et de l’assurance. Quand un pays, au moyen du commerce de transport, devient le magasin et l’entrepôt de l’approvisionnement des autres, il ne peut guère arriver que les habitants de ce pays viennent à manquer de blé. Quoique le commerce de transport puisse ainsi contribuer à réduire le prix moyen du blé en argent sur le marché national, néanmoins il ne fera pas baisser par là la valeur réelle du blé, il fera seulement hausser un peu la valeur réelle de l’argent.

Le commerce de transport pour le blé fut, par le fait, interdit dans la Grande-Bretagne. Dans toutes les circonstances ordinaires, l’importation des blés étrangers était comme prohibée par les droits exorbitants dont elle était chargée, et qui n’étaient pas restituables, pour la plus grande partie du moins lors de l’exportation ; et dans les circonstances extraordinaires, quand une disette obligeait de suspendre ces droits par des lois temporaires, l’exportation était toujours prohibée. Ainsi, par ce système de lois, le commerce de transport se trouva, de fait, interdit dans tous les cas.

Ce système de lois, qui est lié avec l’établissement de la prime, ne parait donc nullement mériter les éloges qui lui ont été prodigués.