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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/178

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non-seulement donnait quelque satisfaction au peuple, mais encore souvent formait une sorte de garnison dans une province nouvellement conquise, dont autrement l’obéissance aurait été fort peu assurée. Ainsi, soit que l’on considère la nature de l’établissement en lui-même, soit que l’on considère les motifs qui l’avaient fait faire, une colonie romaine était tout à fait différente d’une colonie grecque. Aussi les mots qui, dans les langues originaires, désignaient ces différents établissements avaient-ils des significations fort différentes. Le mot latin colonia veut simplement dire plantation ou culture des terres. Le mot grec [mot en grec dans le texte] veut dire au contraire une séparation de demeure, une émigration du pays, un abandon de la maison. Mais quoique les colonies établies par le peuple romain différassent à beaucoup d’égards des colonies grecques, cependant l’intérêt qui le porta à les établir n’était pas moins simple ni moins évident. Ces deux institutions tirèrent l’une et l’autre leur origine, ou d’une nécessité indispensable, ou d’une utilité claire et manifeste[1]

  1. La constitution des anciennes colonies comporte des considérations qui ont excité beaucoup d’intérêt et donné lieu à de nombreuses investigations. Une Dissertation de Bougainville, qui remporta le prix décerné par l’Académie des inscriptions au meilleur essai sur cette question, fut publiée en 1745.

    Le professeur Barron de Saint-André, dans un écrit anonyme intitulé History of the colonisation of the free states of antiquities, s’efforça de prouver que les anciens exerçaient sur leurs colonies la même espèce de contrôle que les modernes exerçaient ordinairement sur les leurs. Le traité de Barron fut réfuté par le docteur Lymonds, de Cambridge, qui publia des Remarks à ce sujet en 1778, et par sir William Mereddith, dans les Historical remarks on the taxation of free states, publiées en 1784. Beyne a écrit quelques dissertations savantes sur ce sujet dans ses Opuscula academica. Mais le meilleur ouvrage sur les colonies des anciens est sans doute celui de Sainte-Croix ; De l’état et du sort des anciennes colonies, publié en 1778. La Verona illustrata du savant marquis Maffei contient un excellent exposé du système de colonisation des Romains. Raoul-Rochette, dans son volumineux ouvrage sur les Colonies grecques, a recherché leur histoire jusque dans les plus petits détails ; mais il manque de la connaissance des principes, et ses vues générales ne sont pas suffisamment approfondies.

    Malgré les nombreux ouvrages publiés pendant le dernier demi-siècle, un bon traité sur cet important sujet est encore à désirer. L’History of the British west Indian colonies de Bryan Edward est bien écrite ; mais il exagère leur importance, et il a une forte propension pour les propriétaires. La Colonial policy de lord Breugham fut publiée en 1803. Elle contient des renseignements auxquels on ne peut pas toujours se fier, sur les systèmes coloniaux des différentes nations européennes ; mais, sous les autres rapports, cet ouvrage n’a aucune valeur. L’auteur exagère l’importance des colonies beaucoup plus encore qu’Edward ; il défend ou atténue les oppressions restrictives si fréquemment imposées sur leur commerce, et qui ont été aussi funestes aux métropoles qu’aux colonies. Il prétend, pour justifier ces restrictions, « que les intérêts des commerçants, dans l’emploi de leurs capitaux, ne sont nullement les mêmes, dans tous les cas, que les intérêts de la communauté à laquelle ils appartiennent… » (T. I, p. 254.) Il n’est pas nécessaire de parler des ouvrages plus récents sur la colonisation*. Mac Culloch.

    *. Un professeur d’économie politique à l’université d’Oxford, M. Merivale, a fait, pendant les trois dernières années, de la Colonisation et des colonies le principal objet de ses cours. Ces leçons viennent de paraître en deux volumes. A. B.
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