Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/183

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gent qu’on y trouverait appartînt à la couronne. Cette offre fut acceptée par le conseil.

Tant que la totalité ou la plus grande partie de l’or que les premiers chefs de l’entreprise importèrent en Europe ne leur coûta que la peine de piller des sauvages sans défense, cette taxe, quelque lourde qu’elle fût, n’était pas très-difficile à payer ; mais quand les naturels furent une fois dépouillés de tout ce qu’ils en avaient, ce qui fut complètement achevé en six ou huit ans à Saint-Domingue et dans les autres pays de la découverte de Colomb, et quand, pour en trouver davantage, il fut devenu nécessaire de fouiller les mines, alors il n’y eut plus aucune possibilité d’acquitter cette taxe. Aussi dit-on que la manière rigoureuse dont on l’exigea fut la première cause de l’abandon total des mines de Saint-Domingue, qui, depuis, n’ont jamais été exploitées. Elle fut donc bientôt réduite à un tiers, ensuite à un cinquième, puis à un dixième, et enfin à un vingtième du produit brut des mines d’or. La taxe sur l’argent continua pendant longtemps à rester au cinquième du produit brut, et ce n’est que dans le courant de ce siècle qu’elle a été réduite au dixième. Mais il ne paraît pas que les premiers entrepreneurs aient pris un grand intérêt à ce dernier métal. Tout ce qui était moins précieux que l’or ne leur semblait pas digne d’attention.

Toutes les autres entreprises des Espagnols dans le Nouveau-Monde, postérieures à celles de Colomb, paraissent avoir eu le même motif. Ce fut cette soif sacrilège de l’or qui porta Oïeda, Nicuessa et Vasco Nuñez de Balboa à l’isthme de Darien, qui porta Cortez au Mexique, Almagro et Pizarre au Chili et au Pérou. Quand ces aventuriers arrivaient sur quelque côte inconnue, leur premier soin était toujours de s’enquérir si on pouvait y trouver de l’or et, d’après les informations qu’ils se procuraient sur cet article, ils se déterminaient à s’établir dans le pays ou à l’abandonner.

De tous les projets incertains et dispendieux qui mènent à la banqueroute la plupart des gens qui s’y livrent, il n’y en a peut-être aucun de si complètement ruineux que la recherche de nouvelles mines d’or ou d’argent. C’est, à ce qu’il semble, la plus inégale de toutes les loteries du monde, ou celle dans laquelle il y a le moins de proportion entre le gain de ceux qui ont des lots, et la perte de ceux qui tirent des billets blancs ; car, quoique les lots soient en très-petite quantité et les billets blancs très-nombreux, le prix ordinaire du billet est la fortune tout entière d’un homme très-riche. Au lieu de remplacer le capital employé