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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/235

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lande était maintenant proportionnée au commerce actuel de cette république, comme elle l’était alors. Or, dans aucune de ces guerres, ce ne pouvait être à l’acte de navigation qu’elle dut cette grande puissance maritime. Pendant la première, le projet de cet acte venait à peine d’être formé, et quoique, avant les premières hostilités de la seconde, il eût déjà reçu force de loi, cependant aucune de ses dispositions n’avait encore eu le temps de pouvoir produire quelque effet considérable, et bien moins que toutes les autres, celles qui établissaient le commerce exclusif avec les colonies. Les colonies et leur commerce avaient alors fort peu d’importance, en comparaison de celle qu’ils ont aujourd’hui. L’île de la Jamaïque était un désert malsain, fort peu habité et encore moins cultivé. New-York et New-jersey étaient en la possession de la Hollande ; la moitié de Saint-Christophe était aux mains des Français. L’île d’Antigoa, les deux Carolines, la Pensylvanie, la Géorgie et la Nouvelle-Écosse n’étaient pas encore cultivées. La Virginie, le Maryland et la Nouvelle-Angleterre étaient mis en culture ; mais, quoique ces colonies fussent très-florissantes, il n’y avait peut-être pas alors une seule personne en Europe ou en Amérique qui prévît ou qui même soupçonnât le progrès rapide qu’elles ont fait depuis en richesse, en population et en industrie. En un mot, à cette époque, la Barbade était la seule colonie anglaise de quelque importance, dont la situation eût quelque ressemblance avec celle où elle est aujourd’hui. Le commerce des colonies, dont l’Angleterre n’avait encore qu’une partie, même quelque temps encore après l’acte de navigation (car cet acte ne fut exécuté très-strictement que plusieurs années après sa promulgation) ; ce commerce, dis-je, ne pouvait pas, à cette époque, être la cause du grand commerce de l’Angleterre ni de cette grande force navale qui était soutenue par ce commerce. Le commerce qui soutenait alors l’étendue de sa puissance maritime, c’était celui d’Europe et des pays situés autour de la Méditerranée. Or, la part qu’a maintenant l’Angleterre dans ce commerce ne pourrait pas soutenir de pareilles forces navales. Si le commerce des colonies, qui croissait alors, eût été laissé libre à toutes les nations, quelle qu’eût été la part qui en serait échue à la Grande-Bretagne (et il est probable que cette part aurait été très-importante), elle aurait été tout entière en surcroît de ce grand commerce dont l’Angleterre était déjà en possession. Mais, par l’effet du monopole, l’accroissement du commerce des colonies a bien moins été, pour le commerce général de la Grande-Bretagne, la