Aller au contenu

Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/267

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de vraisemblance qu’ils veuillent jamais se soumettre à nous de bonne grâce ; et nous ne devons jamais perdre de vue que le sang, que chaque goutte de sang qu’il faudra répandre pour les y contraindre, sera toujours ou le sang de nos concitoyens, ou le sang de ceux que nous désirons avoir pour tels. Ils voient bien mal, ceux qui se flattent que dans l’état où en sont venues les choses il sera facile de conquérir nos colonies par la force seule. Les hommes qui dirigent aujourd’hui les résolutions de ce qu’ils appellent leur congrès continental se sentent, dans ce moment, un degré d’importance que ne se croient peut-être pas les sujets de l’Europe les plus hauts en dignité. De marchands, d’artisans, de procureurs, les voilà devenus hommes d’État et législateurs ; les voilà employés à fonder une nouvelle constitution pour un vaste empire qu’ils croient destiné à devenir, et qui en vérité paraît bien être fait pour devenir un des plus grands empires et des plus formidables qui aient jamais été au monde. Cinq cents différentes personnes peut-être, qui agissent immédiatement sous les ordres du congrès continental, et cinq cent mille autres qui agissent sous les ordres de ces cinq cents, tous sentent également leur importance personnelle augmentée. Presque chaque individu du parti dominant en Amérique remplit à présent, dans son imagination, un poste supérieur non-seulement à tout ce qu’il a pu être auparavant, mais même à tout ce qu’il avait jamais pu s’attendre à devenir ; et à moins que quelque nouvel objet d’ambition ne vienne s’offrir à lui ou à ceux qui le mènent, pour peu qu’il ait le cœur d’un homme, il mourra à la défense de ce poste.

C’est une observation du président Hénault que nous recherchons aujourd’hui avec curiosité et que nous lisons avec intérêt une foule de petits faits de l’histoire de la Ligue, qui alors ne faisaient peut-être pas une grande nouvelle dans le monde. Mais alors, dit-il, chacun se croyait un personnage important, et les mémoires sans nombre qui nous ont été transmis de ces temps-là ont, pour la plupart, été écrits par des gens qui aimaient à conserver soigneusement et à relever les moindres faits, parce qu’ils se flattaient d’avoir joué un grand rôle dans ces événements. On sait quelle résistance opiniâtre fit la ville de Paris dans cette occasion, et quelle horrible famine elle supporta plutôt que de se soumettre au meilleur des rois de France, au roi qui, par la suite, fut le plus chéri. La plus grande partie des citoyens, ou ceux qui en gouvernaient la plus grande partie, se battaient pour maintenir leur