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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/270

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couvertes ont été faites, il est impossible qu’on aperçoive encore toute l’étendue des conséquences qu’elles doivent amener à leur suite. Aucune sagesse humaine ne peut prévoir quels bienfaits ou quelles infortunes ces deux grands événements préparent aux hommes dans la suite des temps. Par l’union qu’ils ont établie en quelque sorte entre les deux extrémités du monde, par les moyens qu’ils leur ont donnés de pourvoir mutuellement aux besoins l’une de l’autre, d’augmenter réciproquement leurs jouissances et d’encourager de part et d’autre leur industrie, il paraîtrait que leur tendance générale doit être bienfaisante. Il est vrai que, pour les naturels des Indes orientales et occidentales, les avantages com­mer­ciaux qui peuvent avoir été le fruit de ces découvertes ont été perdus et noyés dans un océan de calamités qu’elles ont entraînées après elles. Toutefois, ces cala­mités semblent avoir été plutôt un effet accidentel que le résultat naturel de ces grands événements. À l’époque particulière où furent faites ces découvertes, la supé­riorité de forces se trouva être si grande du côté des Européens, qu’ils se virent en état de commettre impunément toutes sortes d’injustices dans ces contrées reculées. Peut-être que dans la suite des temps les naturels de ces contrées deviendront plus forts ou ceux de l’Europe plus faibles, de sorte que les habitants de toutes les différentes parties du monde arriveraient à cette égalité de forces et de courage qui, par la crainte réciproque qu’elle inspire, peut seule contenir l’injustice des nations indépendantes, et leur faire sentir une sorte de respect des droits les unes des autres. Or, il n’y a rien qui paraisse plus propre à établir une telle égalité de forces que cette communication mutuelle des connaissances et des moyens de perfection de tous les genres, qui est la suite naturelle ou plutôt nécessaire d’un vaste et immense commerce de tous les pays du monde avec tous les pays du monde.

En même temps aussi, un des principaux effets de ces découvertes a été d’élever le système mercantile à un degré de splendeur et de gloire auquel il ne serait jamais arrivé sans elles. L’objet de ce système est d’enrichir une grande nation, plutôt par le commerce et les manufactures que par la culture et l’amélioration des terres, plutôt par l’industrie des villes que par celle des campagnes. Or, par une conséquence de ces découvertes, les villes commerçantes de l’Europe, au lieu d’être les manufacturiers et les voituriers seulement d’une très-petite partie du monde (cette partie de l’Europe qui est baignée par l’océan Atlantique, et les pays voisins des mers Baltique et Méditerra­née), sont devenues