Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/275

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vers ces emplois une trop grande quantité de capital, alors la baisse des profits qui se ferait sentir dans ceux-ci, et la hausse qui aurait lieu dans tous les autres, les amèneraient sur-le-champ à réformer cette distribution vicieuse. Ainsi, sans aucune intervention de la loi, les intérêts privés et les passions des hommes les amènent à diviser et à répartir le capital d’une société entre tous les différents emplois qui y sont ouverts pour lui, dans la proportion qui approche le plus possible de celle que demande l’intérêt général de la société[1].

Toutes les différentes mesures et les règlements du système mercantile dérangent nécessairement plus ou moins cette distribution naturelle du capital, la plus avantageuse de toutes. Mais les règlements relatifs au commerce de l’Amérique et des Indes orientales la dérangent peut-être plus que tout autre, parce que le commerce avec ces deux vastes continents absorbe une plus grande quantité de capital que deux autres branches de commerce quelconque n’en pourraient absorber. Néanmoins, les règlements qui opèrent ce dérangement à l’égard de ces deux différentes branches de commerce ne sont pas absolument de même nature. Le monopole est bien le grand ressort de ces règlements, dans l’une de ces branches comme dans l’autre ; mais ce sont deux sortes de monopoles différents. C’est toujours le monopole, d’une espèce ou d’une autre, qui est, à ce qu’il semble, le ressort unique employé par le système mercantile.

Dans le commerce de l’Amérique, chaque nation tâche de s’emparer toute seule, autant qu’il lui est possible, de tout le marché de ses colonies, en excluant ouvertement les autres nations de tout commerce direct avec elles. Pendant le cours de la plus grande partie du seizième siècle, les Portugais tâchèrent de soumettre à un pareil régime le commerce des Indes orientales, en vertu du droit exclusif de naviguer dans les mers de l’Inde, auquel ils prétendaient pour en avoir trouvé la route les premiers. Les Hollandais continuent encore à exclure toutes les autres nations européennes de tout commerce direct avec leurs îles à épices. Les monopoles de cette sorte sont évidemment établis contre toutes les autres nations de l’Europe, qui, par là, se voient

  1. Les capitaux sont toujours attirés vers les entreprises qu’on considère comme devant, à circonstances égales, rapporter le plus ; et on peut dire que des affaires, quelle que soit d’ailleurs leur différence, offrent au public les mêmes avantages quand elles rapportent des bénéfices égaux.
    Mac Culloch.