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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/310

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Mais si l’effet de cet avilissement du prix peut bien n’avoir pas été très-considérable sur la quantité du produit annuel, son effet sur la qualité, pourrait-on croire, a dû être nécessairement fort important. Il serait naturel de présumer qu’à mesure de l’avilissement du prix, la qualité de laine anglaise a dû, dans la même proportion à peu près, se dégrader, sinon au-dessous de ce qu’elle était dans l’ancien temps, au moins au-dessous de ce qu’elle eût été naturellement dans l’état actuel de la culture et de l’amélioration. Comme la qualité dépend de la nourriture des brebis, de la nature de leur pâturage et de la manière plus ou moins propre et soignée dont elles sont tenues pendant tout le temps que la toison met à pousser et à croître, il est assez naturel de penser que l’attention qu’on apportera à toutes ces choses sera toujours en proportion de la récompense qu’on pourra espérer de la toison, pour se payer du travail et de la dépense que cette attention aura exigés. Néanmoins, il arrive que la bonté de la toison dépend en grande partie de la santé, de la taille et de la force de l’animal ; la même attention qu’il faut apporter pour bonifier le corps de la brebis est, à un certain point, suffisante pour bonifier la toison. Malgré la baisse que le prix a souffert, on assure que la laine anglaise a considérablement gagné en qualité, même pendant le cours de ce siècle. Peut-être aurait-elle encore plus gagné à cet égard, si le prix eût été meilleur ; mais si l’avilissement du prix a pu nuire à cette bonification, il ne l’a certainement pas empêché totalement.

Les mesures violentes établies par ces règlements n’ont donc pas, à ce qu’il semble, autant influé qu’on aurait pu s’y attendre, tant sur la quantité du produit annuel de la laine, que sur sa qualité, quoique je sois d’avis qu’elles ont dû vraisemblablement influer beaucoup plus sur la dernière que sur l’autre ; et si, au total, l’intérêt des producteurs de cette denrée a dû en souffrir, c’est toujours de beaucoup moins qu’on aurait pu le penser.

Toutefois, ces considérations ne sauraient justifier la prohibition absolue de l’exportation de la laine, mais elles suffiront pour justifier pleinement l’imposition d’une forte taxe sur cette exportation.

Blesser les intérêts d’une classe de citoyens, quelque légèrement que ce puisse être, sans autre objet que de favoriser ceux de quelque autre classe, c’est une chose évidemment contraire à cette justice, à cette égalité de protection que le souverain doit indistinctement à ses sujets de toutes les classes. Or, certainement la prohibition nuit jusqu’à