Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/61

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navale qui fût dans le cas de menacer la sûreté de l’Angleterre.

L’Acte de navigation n’est pas favorable au commerce étranger ou à l’accroissement de cette opulence dont ce commerce est la source. L’intérêt d’une nation, dans ses relations commerciales avec les nations étrangères, est le même que celui d’un marchand, relativement aux diverses personnes avec lesquelles il fait des affaires, c’est-à-dire d’acheter au meilleur marché et de vendre le plus cher possible. Mais elle sera bien plus dans le cas d’acheter à bon marché quand, par la liberté de commerce la plus absolue, elle encouragera toutes les nations à lui apporter les marchandises qu’elle peut désirer acheter, et par la même raison elle sera bien plus dans le cas de vendre cher quand ces marchés seront par là remplis du plus grand nombre d’acheteurs. L’Acte de navigation ne met, à la vérité, aucune charge sur les bâtiments étrangers qui viennent exporter les produits de l’industrie de la Grande-Bretagne. Même l’ancien droit d’Alien[1], qui avait coutume de se payer sur toutes les marchandises exportées comme sur celles importées, a été, par plusieurs actes subséquents, supprimé sur la plupart des articles d’exportation. Mais si des prohibitions ou de gros droits empêchent les étrangers de venir vendre, ceux-ci ne sauraient consentir à se présenter toujours pour acheter, parce que, obligés de venir sans cargaison, ils perdraient le fret depuis leur pays jusqu’aux ports de la Grande-Bretagne. Ainsi, en diminuant le nombre des vendeurs, nous diminuons nécessairement celui des acheteurs, et par là nous sommes d’autant plus exposés, non-seulement à acheter plus cher les marchandises étrangères, mais encore à vendre les nôtres meilleur marché que s’il y avait une parfaite liberté de commerce. Néanmoins, comme la sûreté de l’État est d’une plus grande importance que sa richesse, l’Acte de navigation est peut-être le plus sage de tous les règlements de commerce de l’Angleterre.

Le second cas dans lequel il sera avantageux, en général, de mettre quelque charge sur l’industrie étrangère pour encourager l’industrie nationale, c’est quand le produit de celle-ci est chargé lui-même de quelque impôt dans l’intérieur. Dans ce cas, il paraît raisonnable d’établir un pareil impôt sur le produit du même genre, venu de fabrique étrangère. Ceci n’aura pas l’effet de donner à l’industrie nationale le

  1. Du mot alien, étranger, parce que ce droit était établi sur tout ce qui allait à l’étranger ou en venait.