Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/669

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

font des articles qu’on pourrait assujettir à des impôts modérés soit moindre que celle même des dernières classes du peuple d’Angleterre. C’est l’intérêt de leur maître de les bien nourrir et de les tenir toujours bien portants et bien dispos, afin qu’ils puissent bien travailler, tout comme c’est son intérêt de traiter ainsi le bétail qui travaille pour lui. Aussi ont-ils presque partout leur ration de rhum et de mélasse ou de bière[1], tout comme les domestiques blancs ; et vraisemblablement on ne leur retrancherait pas cette ration, quand même ces articles seraient assujettis à des impôts modérés. Ainsi la consommation des denrées assujetties à l’impôt serait Probablement, à proportion de la population, aussi forte en Amérique et dans les Indes Occidentales que dans toute autre partie de l’empire britannique. À la vérité, la facilité de frauder serait beaucoup plus grande, l’Amérique étant beaucoup plus faiblement peuplée, à proportion de l’étendue du territoire, que ne le sont l’Écosse et l’Irlande. Néanmoins, si le revenu qu’on retire actuellement des différents droits sur la drêche et les liqueurs et boissons de drêche venait à être produit par un droit unique sur la drêche, on ôterait absolument tous les moyens qu’il y a de frauder les droits dans la branche la plus importante de l’accise ; et si les droits de douane, au lieu d’être imposés sur presque tous les différents articles d’importation, étaient bornés à un petit nombre d’articles d’un usage et d’une consommation plus générale, que d’ailleurs la perception de ces droits se fit suivant les lois de l’accise, alors, si les moyens de frauder n’étaient pas entièrement ôtés, ils seraient extrêmement diminués. En conséquence de ces deux réformes, qui paraissent fort simples et très-faciles, les droits de douane et d’accise rendraient vraisemblablement autant de revenu, à proportion de la consommation, dans les provinces les plus mal peuplées, qu’ils en rendent actuellement, à proportion de la consommation, dans les provinces les plus peuplées.

On a objecté, il est vrai, que les Américains n’avaient point de monnaie d’or et d’argent, le commerce intérieur du pays roulant sur un papier qui a cours de monnaie, et tout l’or et l’argent qui peuvent leur survenir étant toujours envoyés dans la Grande-Bretagne en retour des marchandises qu’ils reçoivent de nous. Or, sans or et sans argent, ajoute-t-on, il n’y a pas de possibilité de payer d’impôt. Nous leur avons

  1. Spruce-beer, sorte de bière colorée avec l’écorce de sapin.