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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/671

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par degrés. En 1747[1], cette colonie paya ainsi la majeure partie de ses dettes avec le dixième de la valeur pour laquelle elle avait d’abord donné ses billets. Il convient extrêmement aux colons d’épargner les dépenses que leur occasionnerait l’usage de la monnaie d’or et d’argent dans leurs affaires intérieures, et il convient tout autant au gouvernement colonial de leur fournir une valeur intermédiaire qui, bien qu’accompagnée de quelques inconvénients assez graves, les met à même d’éviter cette dépense. L’extrême abondance de papier-monnaie chasse l’or et l’argent de toutes les transactions intérieures dans les colonies, par la même raison qui lui fait chasser ces métaux de la plus grande partie des transactions intérieures en Écosse ; et ce qui a occasionné, dans un pays comme dans l’autre, cette grande abondance de papier-monnaie, ce n’est pas la pauvreté du pays, mais l’esprit actif et entreprenant du peuple, et le désir qu’il a d’employer, comme capital utile et productif, tous les fonds qu’il peut venir à bout de se procurer.

Dans le commerce extérieur que les différentes colonies font avec la Grande-Bretagne, l’or et l’argent se trouvent plus ou moins employés, précisément à proportion qu’ils y sont plus ou moins nécessaires. Quand ces métaux n’y sont pas nécessaires, il est bien rare qu’on les y voie. Quand ils y sont nécessaires, en général, ils ne manquent pas.

Dans le commerce d’entre la Grande-Bretagne et les colonies à tabac, pour l’ordinaire les marchandises de la Grande-Bretagne sont avancées aux colons à un crédit assez long, et elles sont ensuite acquittées en tabac qui se compte à un prix convenu. Il est plus commode pour les colons de payer en tabac que de payer en or et en argent. Un marchand trouvera toujours plus avantageux pour lui de payer les marchandises que lui vendent ses correspondants, en quelque autre espèce de marchandise dont il fait commerce, que de les payer en argent. Alors ce marchand n’aura pas besoin de garder par devers lui une partie de son capital sans emploi et en argent comptant, pour satisfaire aux traites qui lui seraient présentées. Il pourra avoir en tout temps, dans sa boutique ou dans son magasin, une plus grande quantité de marchandises et, en conséquence, donner une plus grande étendue à son commerce. Mais il arrive rarement qu’il soit commode pour tous les correspondants d’un marchand de recevoir le payement

  1. Voyez l’Histoire de Massachussets, par Hutchinson, col. II, page 436 et suiv. (Note de l’auteur).