Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/678

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pense. Mais des pays qui ne contribuent au soutien de l’empire ni par un revenu ni par des forces militaires, peuvent-ils être regardés comme des provinces ? Ce sont tout au plus des dépendances accessoires, une espèce de cortège que l’empire traîne à sa suite pour la magnificence et la parade. Or, si l’empire n’est pas en état de soutenir plus longtemps la dépense de traîner avec lui ce cortège, il doit certainement le réformer ; et s’il ne peut pas élever son revenu à proportion de sa dépense, il faut au moins qu’il accommode sa dépense à son revenu. Si, malgré leur refus de se soumettre aux impôts de l’empire britannique, il faut toujours regarder les colonies comme provinces de cet empire, leur défense peut causer à la Grande-Bretagne, dans quelque guerre future, une aussi forte dépense qu’elle en ait jamais causé dans aucune guerre précédente. Il y a déjà plus d’un siècle révolu que ceux qui dirigent la Grande-Bretagne ont amusé le peuple de l’idée imaginaire qu’il possède un grand empire sur la côte occidentale de la mer Atlantique. Cet empire, cependant, n’a encore existé qu’en imagination seulement. Jusqu’à présent, ce n’a pas été un empire ; ce n’a pas été une mine d’or, mais le projet d’une mine d’or ; projet qui a coûté des dépenses énormes, qui continue à en coûter encore, et qui nous menace d’en coûter de semblables à l’avenir, s’il est suivi de la même manière qu’il l’a été jusqu’à présent, et cela sans qu’il promette de nous rapporter aucun profit ; car, ainsi qu’on l’a déjà fait voir, les effets du commerce des colonies sont une véritable perte au lieu d’être un profit pour le corps de la nation. Certes, il est bien temps aujourd’hui qu’enfin ceux qui nous gouvernent ou réalisent ce beau rêve d’or dont ils se sont bercés eux-mêmes peut-être, aussi bien qu’ils en ont bercé le peuple, ou bien qu’ils finissent par faire cesser, et pour eux et pour le peuple, un songe qui n’a que trop duré. Si le projet ne peut pas être mené à sa fin, il faut bien se résoudre à l’abandonner. S’il y a quelques provinces de l’empire britannique qu’on ne puisse faire contribuer au soutien de l’ensemble de l’empire, il est assurément bien temps que la Grande-Bretagne s’affranchisse de la charge de les défendre en temps de guerre et d’entretenir, en temps de paix, une partie quelconque de leur établissement civil et militaire. Il est bien temps qu’enfin elle s’arrange pour accommoder dorénavant ses vues et ses desseins à la médiocrité réelle de sa fortune.

fin du tome second et dernier.