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LA CORVÉE

jette du blé cassé aux volailles curieuses et bourre de foin parfumé la crèche de ses bœufs.

Notre ami très pressé laisse les lapins voleurs courir dans le potager et s’en donner à cœur-joie au milieu des derniers choux, des énormes navets et des voyantes carottes…

Qu’importe les légumes ! le brave campagnard s’en va au bis demandé par le curé en plein prône dimanche, pour donner aux déshérités du canton le bois nécessaire afin de lutter contre les giboulées hurlantes qui siffleront bientôt sur la plaine, mouvante de glaces et de frimas.

Dire un dernier bonjour à Louisa, sa chère femme qui emplit de galettes un panier d’osier ; coiffer un bonnet de laine, tricoté par sa huitième brue lors du dernier compérage et se diriger vers la croix du chemin, rendez-vous des bûcheux, sont pour Jolivet l’affaire d’un instant.

Un à un, arrivent ses compagnons : ils seront nombreux puisque le curé l’a dit : « Toutes les haches du hameau devront frapper dur, à 8 heures au plus tard, dans la côte à Paquette… Il me faut 50 cordes de bois franc… et du beau !… »

Bientôt 30 gars solides, la jambe moulée dans des bottes sauvages, s’agenouillent un instant à la voix du prêtre et, devant le Christ de plâtre, gris