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LA CORVÉE

pendant que la jeune femme, effrayée, se réfugiait vers le pauvre lit, dans un angle, et serrait son bébé sur son cœur.

À cette heure même, dans la petite demeure de la Rivière-à-Gagnon, la lampe venait de s’allumer, et, agenouillée devant l’image de la Sainte-Famille derrière laquelle passait le rameau bénit, à demi-baignée dans la lumière jaune descendant de l’abat-jour, la vieille mère priait, son âme tendue toute vers Celui qui console, qui pardonne et qui ramène. La flamme du poêle jetait parfois des ardeurs sur le mur en face, le vent travaillait les poutres du grenier, de sorte que l’âme obscure de la vieille maison semblait s’agiter et demander aussi le retour du prodigue. Au dehors la solitude était complète sur la terre, tout se taisait dans les bois enneigés ; mais le firmament tout entier, criblé d’étoiles, s’arrondissait en voûte d’église sur la petite maison où une âme, invinciblement croyante, traitait avec Dieu ! Et parce que les humbles, ceux qui ont écouté toute leur vie, à chaque heure, la voix divine de la terre, ont des façons directes de prier que nous ne connaissons pas, Dieu, qui est d’abord le Dieu des humbles, entendit enfin la prière maternelle.

Là-bas, au loin, dans la ville trépidante, où le