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LA CORVÉE

l’arbre devenait hideux ; dépouillées de leurs feuilles, les branches amputées dressaient contre le ciel mauve d’énormes gestes de menace.

Le soir tombait et on alla souper. Marie alluma la lampe, et comme la route ne pouvait rester barrée pour le lendemain, jour de marché, les hommes prirent des fanaux et retournèrent à l’ouvrage. Dans la nuit qui montait sans lune et étreignait toutes choses, le bruit des haches, le grincement des godendards s’attaquant au tronc, le pas saccadé des chevaux tirant à la chaîne les énormes billes, les petites flammes qui couraient dans l’arbre, cette hâte, cet acharnement contre une chose morte et tombée, tout cela avait l’air d’un crime.

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Un mois après, le curé de l’Ancienne-Lorette recommanda aux prières des paroissiens l’âme de Siméon Hamel, décédé à l’âge de soixante-dix ans. Marie le suivit de près. Ils dorment maintenant tous deux à côté des ancêtres, à l’ombre de l’église, tout au bord de l’écorre de la rivière. En vérité, l’homme et l’arbre avaient des racines communes dans la terre des Hamel !

Les humbles qui vivent tout près de la terre et n’écrivent pas, retournent à elle tout entiers.