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LE PETIT MONSIEUR

— À quand la fête ?

— Mon Dieu, l’plus tôt possible. Samedi soir ferait ben not’affaire, répondit Servan. « Qu’en dis-tu ? »

— Hum ! l’temps est ben court pour avertir les jeunes gens, reprit la mère. « C’est aujourd’hui jeudi »…

— Oh ! il suffira d’le dire à Louis Valande, demain matin, et tout l’monde le saura, du village à la ville. C’est mieux qu’un journal que c’gars-là : c’est un télégraphe !

Servan se leva de table, alla chercher sa pipe sur le banc des seaux, prit un tison dans la braise du poêle, le posa sur le tabac dont sa pipe était encore à demi remplie, aspira avec force la fumée, puis alla s’asseoir posément dans l’ombre, réchauffé, content, fermant les yeux de bien-être et de volupté.

Prestement la table se débarrassait dans un cliquetis réjouissant de vaisselle entrechoquée, mais Servan, qui s’y plaisait d’habitude, bientôt ne l’entendit plus, perdu dans un rêve étrange et doux. De toute son âme il écoutait parler sa maison, son foyer, la voix de ses vieux meubles qui semblaient craquer d’aise dans la chaleur grandissante de ses murs, des marches de son escalier où tant des siens