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l’aristocratie abdiqua l’héritage de l’épiscopat gallo-romain et prit d’autres idées, embrassa des doctrines différentes. Ce serait une grave erreur de le croire. Un diplomate disait ces jours-ci : « À Rome, on n’est jamais pressé, le Saint-Siège n’est pas comme les gouvernements d’un jour qui comptent les minutes ; la papauté a toujours eu confiance dans le temps ; les mois et les années sont de fort petites choses, vues du haut de l’observatoire romain. » Ce que le diplomate disait de la papauté, on peut le dire aussi bien de l’Église : tout se tient dans l’Église, rien ne s’y perd, rien n’y meurt, et voilà pourquoi l’épiscopat franc maintint dans son intégrité la tradition romaine, qui, depuis Constantin, n’avait cessé d’animer le for extérieur du monde catholique.

Cette persistance de la tradition romaine amène naturellement M. Rocher au second point de sa thèse, c’est-à-dire à l’origine du pouvoir temporel des évêques du Puy.

On a beaucoup discouru sur les origines de la suzeraineté dont nos évêques furent investis d’abord sur la ville et plus tard sur l’entier diocèse. Des théories fort ingénieuses ont été émises à cet égard par des hommes d’une autorité reconnue : M. Mandet, le véritable initiateur de l’histoire vellave ; M. Aymard, qui a mis au service de cette question une critique du meilleur aloi ; M. l’abbé Fraisse, savant modeste et trop avare de ces essais remarquables où le bon sens et l’érudition se marient dans une délicate mesure. Ces esprits distingués ont-ils tenu suffisamment compte des antécédents du pouvoir temporel de nos évêques ? Peut-être la solution du problème est-elle là et non ailleurs.

L’empire chrétien avait affaire à un régime dissous, à une société en ruines. Les institutions étaient belles dans ce régime, empreintes du génie administratif de la vieille Rome, mais à cette vaste machine, si savamment construite, il manquait l’essentiel : la vie morale. Le monde païen s’en allait à la dérive ; Constantin et ses successeurs sentirent que l’unique remède propre à prolonger les jours du moribond résidait dans les