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temps à autre la puissance des évêques, mais cette magistrature, provoquée par la dissolution de l’empire et que l’inaptitude civile des Francs rendit à son tour nécessaire, se retrouvait à son heure et se relevait constamment de ses échecs. Les Francs innovèrent en politique : au point de vue administratif, ils maintinrent les principales assises du gouvernement intérieur des cités. La tradition romaine continua de vivifier la Gaule des VIIIe et IXe siècles siècles. C’est cette persistance de la tradition romaine qui fit de la haute tutelle des évêques sur leurs villes une institution souple et vivace, parfois démembrée, jamais abolie et couvant toujours sous la cendre des révolutions.

On ne comprendrait guère que l’Église, maîtresse des âmes, seule debout au sein d’une anarchie générale, en possession d’un prestige sans pareil, eût laissé dépérir l’héritage politique, légué à l’épiscopat par les empereurs chrétiens. Loin de là : l’Église tint ferme et eut le dernier mot. Sans doute il y eut des éclipses, des interrègnes dans le gouvernement urbain des évêques. Le principe était méconnu en théorie, foulé aux pieds dans la pratique, mais, nous l’avons déjà dit, les ans glissent sur l’Église : tôt ou tard elle prend sa revanche. Qu’on aille au fond des choses et l’on verra l’Église profiter des révolutions les plus contradictoires ! Ainsi le système de Charlemagne et l’établissement féodal semblent, au premier aspect, l’un et l’autre un démenti éclatant à la puissance séculière des évêques. Charlemagne ébaucha l’œuvre chimérique d’une centralisation universelle. Il envoya dans chaque province des représentants de son autorité : les comtes, et ceux-ci, à leur tour, déléguèrent sur place leur mandat à des lieutenants : les vicomtes. Les Ariman, installés à Polignac, furent d’abord les suppléants locaux du comte de Velay. Cette situation amovible devint un patrimoine de famille avec le capitulaire de Kiersy-sur-Oise (877), qui constitua le régime féodal par l’hérédité des fiefs et des bénéfices. L’évêque du Puy, comme tous ses collègues du dehors, sentit le niveau commun de la centralisation et dut momentanément s’effacer devant les fonctionnaires impériaux,