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le château de chavaniac

prématurément à la science[1]. En 1817, Lafayette fit à Chavaniac un séjour plus long que de coutume. En voici le motif :

« Pendant la famine de l’année 1817, la misère était à son comble à Lagrange, et le château nourrissait tous les pauvres du pays et ceux des communes voisines ; on en voyait jusqu’à sept cents par jour ; on leur faisait des soupes économiques, on leur donnait du pain et de l’argent ; mais les bourses et les greniers se vidaient avec trop de promptitude pour attendre la fin de la saison. Vers le mois de juin, on tint conseil de famille au château, pour aviser aux moyens de subvenir aux besoins de tant de malheureux. On observa à Lafayette qu’il était impossible de continuer la distribution que l’on faisait, sans quoi, avant six semaines, il n’y aurait plus rien à la maison. « Eh bien ! dit Lafayette, il y a un moyen bien simple de résoudre ce difficile problème ; nous pouvons vivre en Auvergne ; en nous retirant à Chavaniac, nous abandonnerons aux pauvres ce que nous aurions consommé à Lagrange ; ce sera le moyen de prolonger leur existence jusqu’aux moissons. » Sa proposition fut adoptée avec joie par sa digne famille, et mise à exécution »[2].

En 1829, par suite des événements politiques, il fut particulièrement fêté par ses compatriotes. Les habitants de Brioude, après l’avoir retenu un jour au milieu d’eux et lui avoir offert un banquet patriotique, organisèrent, pour le conduire à Chavaniac, une escorte d’honneur qui, grossie, sur la route, des députations de Paulhaguet, Langeac et Aurac, comptait plus de quatre-vingts cavaliers lors de son arrivée au château. « Est-il besoin d’ajouter, nous dit un des témoins de cette manifestation, que tous les habitants de Chavaniac se portèrent en masse au devant de leur vieil ami et de leur ancien bienfaiteur, du père de leur ami et

  1. Lafayette dut son salut en 1808, après la découverte de la conspiration du général Malet, dans laquelle la police impériale avait cherché à l’impliquer, à l’amitié du père de Victor Jacquemont qui fut puni de son dévouement par une longue détention, l’exil et la perle de ses fonctions de membre du Conseil de l’Instruction publique. Voy. Mémoires de Lafayette, t. V, p. 298.
  2. Jules Cloquet, loc. cit., p. 258.