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cannes à sucre sur le bord du Surinam, à environ dix milles de la ville ; ils y ont un temple et une usine considérable.

Les Moraves ont quelque chose des mœurs phalanstériennes ; leurs enfants sont envoyés en Europe pour y faire leur éducation ; quand l’un d’eux doit prendre femme, celle-ci lui est adressée toute choisie par les Frères Moraves d’Europe, etc. Leur grande affaire est de gagner de l’argent, et ils en envoient beaucoup en Saxe, dit-on.

Les protestants comptent trois temples ; celui des luthériens a deux ministres qui prêchent alternativement, l’un que JÉSUS-CHRIST est Dieu, l’autre qu’il ne l’est pas ; ce qui, du reste, paraît assez indifférent à la plupart de leurs adeptes.

Quant aux juifs, ils n’ont pas de synagogue.

La ville a trois mauvais journaux, qui s’occupent, avec une grande ardeur, à combattre les travaux du vicaire apostolique, de ses prêtres et de ses religieuses.

On trouve dans la Guyane hollandaise un assez grand nombre de « Portugais » originaires du Brésil. Malheureusement, ils sont en général, des « cadavres de catholiques », tenant un peu à être baptisés, très peu à recevoir les autres sacrements si ce n’est peut-être l’extrême-onction ; mais désirant surtout après leur mort la sépulture ecclésiastique.

Enfin dans les exploitations éparses sur le territoire, il y a beaucoup de noirs, qui, tout en étant affranchis de nom depuis deux ou trois ans, sont assujettis à servir encore leurs maîtres pendant dix années. L’instruction religieuse est bien faible parmi eux ; les uns, — c’est le petit nombre, — sont catholiques ; les autres sont censés protestants ou moraves. Il n’est pas rare aussi de trouver des Chinois employés comme domestiques ou travailleurs ; aucun d’eux presque n’est chrétien. On rencontre encore des indigènes, mais ils sont dispersés au loin et sans beaucoup de rapports jusqu’à présent avec les missionnaires.

Le vicariat a été confié à des prêtres séculiers jusqu’à l’arrivée de Mgr Swinkels, de la Congrégation du Très-Saint-Rédempteur. Le vicaire apostolique actuel est Mgr Schaap. Le prélat n’a pour l’aider dans sa tâche que seize Pères et quatre Frères de sa Congrégation, avec lesquels il vit en communauté. Quatre Pères sont toujours absents à tour de rôle ; ils visitent successivement les habitations et les campements indiens. Tous travaillent beaucoup. Mgr Schaap leur donne l’exemple. Chaque dimanche, il donne des conférences auxquelles viennent assister bon nombre de protestants. C’est lui aussi qui dirige les Religieuses.

Les Pères qui sont à Paramaribo se partagent la ville ; et tous les jours, chacun va dans son quartier visiter ses malades. Ils évangélisent quarante-sept habitations où ils baptisent chaque année un bon nombre de noirs.

Les fruits de leur ministère ne laissent pas d’être consolants. L’année dernière, plusieurs protestants se sont convertis, et la plupart étaient des personnages assez considérables.

Les indigènes de l’intérieur reçoivent de temps à autre la visite des Pères.

Le genre de vie de ces Indiens est des plus simples.

Leur première occupation, c’est la chasse et la pêche ; la culture de la terre vient bien loin après, et cette culture consiste dans un abattis de quarante ou cinquante ares de superficie, quelquefois moins, le plus souvent éloigné, d’une journée ou deux, du village. Là, au milieu d’immenses troncs d’arbres que le feu n’a consumés qu’à demi, ils plantent un peu de manioc, de rares bananiers, sèment quelques poignées de riz et de pistaches, juste ce qu’il faut pour leur usage.

Quant aux denrées d’exportation, comme le café, le cacao, la canne à sucre, la vanille, les arbres à épices, le cannellier et le giroflier, les résines et les gommes, les graines oléagineuses, etc.., ils ne s’en occupent pas, et ne les cultivent, ni ne les récoltent. En sont-ils plus malheureux et plus à plaindre ? N’ayant que des besoins très restreints, sous le triple rapport de la nourriture, du vêtement et du logement, rien ne les excite à produire des choses dont ils n’usent pas, ni à les échanger contre d’autres objets dont ils ignorent jusqu’à l’existence.

Ils ne savent ni lire, ni écrire, ni compter ; l’âge qu’ils ont leur est inconnu, ils ne savent même pas ce que c’est qu’une année, un mois, une semaine ; mais en sont-ils plus à plaindre pour cela ? Ils connaissent les phases de la lune sur lesquelles ils se règlent pour leurs cultures, et même pour la pêche et la chasse ; la marche du soleil leur sert de chronomètre ; leurs récoltes marquent les saisons. Le règne végétal est leur calendrier. Ce qu’ils connaissent admirablement, c’est le fleuve et la forêt. Ils sont d’une incomparable habileté à conduire une pirogue, à éviter un récif, à remonter ou à descendre un rapide.