Page:Société de l’enseignement supérieur - Revue internationale de l’enseignement, volume 37, juin 1899.djvu/331

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
329
LE TRAVAIL EN PROVINCE

sirent ; cette liste, faite à la hâte, est loin d’être aussi bien conçue que si elle était préparée de longue main, et suivant les rencontres de titres intéressants que l’on noterait en vue d’un achat assuré.

Tels sont les matériaux et je ne crains pas d’être démenti, si j’avance qu’il faut s’ingénier de bien des façons pour mener au but un travail, et se procurer les éléments indispensables ; car, on admettra qu’un professeur, consentant à acheter certains livres de fonds, ne peut pas acquérir les volumes qu’il suffit de parcourir ou de consulter, et dont il n’aura plus besoin ultérieurement.

Comme aujourd’hui, et pour d’excellentes raisons dont nous n’avons pas à parler ici, il est bon de diminuer chez tous l’attrait de la résidence à Paris, ne doit-on pas remédier à cette situation, sinon supprimer cette sorte d’infériorité pour le travail, à laquelle est condamné un professeur qui n’est pas dans un centre universitaire ? Examinons les réformes qui s’imposent, relativement aux trois catégories de dépôts scientifiques dont nous avons parlé.

Il faudrait donner plus d’extension aux bibliothèques universitaires ; par l’achat en double de certains ouvrages, la circulation devrait être largement étendue à toute l’Académie. Comme il n’y à pas place pour tous au lycée du chef-lieu académique, tous participeraient ainsi aux richesses intellectuelles qui y sont centralisées.

Mais c’est surtout pour les bibliothèques municipales qu’une réforme s’impose. Les villes doivent y veiller avec autant de soin qu’à l’entretien de la voirie. On parle de décentralisation ; il serait bon de retenir longtemps le professeur dans un mème lycée ; la chose est rendue facile par le nouveau mode d’avancement ; mais, à ces avantages pécuniaires doivent s’ajouter les avantages intellectuels ; si ces derniers font défaut, le professeur, désireux de travailler, sollicitera un changement. Ce ne sera pas toujours l’intérêt du lycée.

Si une ville dépense pour sa bibliothèque, elle n’aura pas à le regretter. Le professeur, augmentant son acquis, en fera profiter la ville qu’il habite ; il rendra sous forme de cours publics, de conférences les secours qu’il aura reçus, et personne ne s’en plaindra.

De plus, si une bibliothèque municipale, logée d’une façon digne d’elle, est ouverte plus longtemps au public, le prêt au dehors pourra être restreint aux seuls travailleurs ; ceux-ci en jouiront d’une façon plus large, et seront plus sûrs de trouver à la bibliothèque les livres qu’ils doivent consulter. Trop souvent le prêt est accordé à une catégorie de lecteurs, plus friands des romans publiés dans les grandes revues que des livres de science.

Le soin de cette réforme revient aux conseils municipaux et aux conseils généraux qui doivent se préoccuper de la vie intellectuelle. Nous constatons qu’ils s’en désintéressent trop souvent.