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documents et notes sur le velay

dans celles des collégiales de la ville et du diocèse, dont j’ai parcouru les titres et les anciens documens avec toute l’exactitude possible.

Voici, Monsieur, ce qui se pratique dans la Cathédrale depuis un temps immémorial. Le dimanche de Paques, et les six jours suivans, si quelqu’un est absent des Matines, dès qu’on a entonné le premier psaume, quelques chanoines et choriers se détachent du chœur avec deux clergeons, dont l’un porte la croix processionale, et l’autre le bénitier. Ils vont deux à deux et en silence à la maison du chanoine absent, et ils y entrent le plus secrètement qu’ils peuvent, de crainte qu’il ne s’éveille et ne s’éclipse. Dès qu’ils sont entrés dans la chambre, le plus ancien donne de l’eau bénite au chanoine, quoiqu’il soit encore au lit, et on chante l’antienne : Hæc dies quam fecit Dominus, etc. Après cette cérémonie, ces messieurs, plus modestes que ceux dont vous faites mention dans votre lettre, donnent au chanoine le temps de s’habiller, et le conduisent ensuite à l’église processionnellement et en silence. Si la maison du chanoine est éloignée de la Cathédrale et hors du cloître, il est en manteau long ; sinon il porte le surplis, l’aumusse et la lingarelle. Le chanoine paresseux en est quitte pour un déjeuner qu’il est obligé de donner à ceux qui lui ont fait l’honneur d’assister à sa toilette, mais il s’y en glisse quelques uns de ceux qui sont restés à Matines. Les plus habiles donnent à dejeuner avant qu’on les conduise à l’église ; le déjeuner en est plus leste et il y a moins de convives. Si on trouve le chanoine hors de sa maison, quand même il serait en chemin pour aller au chœur, il est également aspersé et obligé à l’amende du déjeuner. On assure que les officiers et les conseilliers de la sénéchaussée du Puy étaient sujets à une pareille amende, et qu’on alloit les chercher en procession, lorsqu’ils ne se trouvoient pas au commencement de Matines. Plusieurs anciens, dignes de foi, m’ont assuré l’avoir vu et même d’avoir assisté au déjeuner. On croit par tradition que cette cérémonie n’a été établie que pour exciter les ecclésiastiques et les laiques à être plus assidus à l’office divin au temps le plus solennel de toute l’année. Je vous prie, Monsieur, de me faire part de vos réflexions sur cet ancien usage. Je lis avec avidité toutes les découvertes dont vous faites part au public.

Si vous en faites quelqu’une sur le mot de lingarelle, dont je me suis servi ci-dessus, je vous prie aussi de m’en vouloir faire part. C’est une espèce de scapulaire d’un pied en quarré, qui est de petit gris, doublé de satin rouge pour les chanoines et de bleu ou de violet pour les autres. C’est une espèce de cuirasse de la même fourrure que l’aumusse, et on prétend que c’est en mémoire de ce que Aimard de Monteil, évêque du Puy, fut