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l'auteur du tombeau s'était astreint à reproduire exactement des costumes passés de mode depuis longtemps. L'armure du noble gisant comme les coiffes aux plis multiples et serrés des défuntes sont des notes caractéristiques des costumes en vogue dans la seconde moitié du xiv^ siècle. Aux angles du monument se trouvent les figurines des évangélistes. Cette disposition, si chère à l'icono- graphie chrétienne, se représentera un demi-siècle plus tard dans le gracieux tombeau de Marie de Bourgogne et dans celui de Charles le Téméraire, lequel fut érigé vers le milieu du xvi^ siècle.

Le pourtour était orné de statues représentant, non les seuls proches parents contemporains du défunt, ^mais sa postérité jusqu'au comte de Chirolais.

Ce sont des princes et princesses issus de Philippe le Hardi, à savoir Jean sans Peur, Antoine duc de Brabant et ses deux fils Jean et Philippe, Philippe comte de Nevers, et ses deux fils Charles, Jean et Marie duchesse de Savoie, ses deux fils et ses deux filles Margue- rite duchesse de Bavière et sa fille Jacqueline, Catherine, duchesse d'Autriche. Viennent ensuite les descendants de Jean sans Peur : Marguerite, dauphine de France, Isabelle, duchesse de Penthièvre, Anne, duchesse de Bedford, Agnès, duchesse de Bourbon, Marie avec son mari, Jean de Clèves, Catherine de Bourgogne, Philippe le Bon et Charles le Téméraire, son fils.

Bien que ces personnages occupent la place assignée d'habitude aux deuillants ou pleurants, ils ne témoignent pas la moindre douleur. Certains d'entre eux ont, il est vrai, une attitude pleine de réserve et de calme ; d'autres ont été surpris dans l'action. C'est de fait un cortège d'augustes personnages où chacun figure pour son propre compte. Mais quelle variété et quel naturel dans les poses, quelle vie et quelle diversité dans toutes ces physionomies ! Ni la lourdeur des gravures qui se trouvent dans l'ouvrage de Montfau- con, ni les inexactitudes mêmes qui déparent les gravures de Millin ne nous privent entièrement du charme dont ce monument était empreint. Ce témoignage si important de l'art n'a pas trouvé grâce devant la cupidité ou la sottise humaine ! « Les figures sont toutes de cuivre, écrivait Millin en l'an vu, et c'est ce qui les a fait livrer promptement au creuset, malgré tout l'intérêt qu'elles présentent pour l'histoire et pour le costume qui honorent au plus haut point l'art du moyen âge. »