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l’optique, Newton montrait que la chute des corps sur la terre, ainsi que le mouvement des astres, avaient une seule et même cause ; c’était la théorie de la gravitation universelle. Ainsi Newton dotait la matière d’une nouvelle propriété : l’attraction, et cette nouvelle propriété, il ne la tirait pas de son raisonnement, mais de l’expérience même dont il mettait en avant le rôle décisif pour le progrès des sciences.

Le succès fut immense, et malgré les objections de quelques cartésiens attardés, plus attachés à la métaphysique qu’à la physique de leur maître, après son introduction en France par Voltaire qui s’en fit le chaud défenseur, ainsi que par son amie la marquise du Châtelet, la théorie de Newton fut universellement adoptée. Le grand astronome Laplace a pu même remarquer qu’ « on doit à la France la justice d’observer que, si l’Angleterre a eu l’avantage de donner naissance à la découverte de la pesanteur universelle, c’est principalement aux géomètres français et aux prix décernés par l’Académie des Sciences que sont dus les nombreux développements de cette découverte et la révolution qu’elle a produite dans l’Astronomie, devenue la solution d’un grand problème de mécanique ».

C’est ainsi que Newton prévoyait que, par suite de sa rotation, la terre n’est pas tout à fait sphérique mais un peu aplatie aux pôles. Deux missions scientifiques furent organisées par l’Académie des Sciences et des savants français allèrent exécuter des mesures, les uns près de l’Équateur, au Pérou, les autres près du Pôle, en Laponie. Ils confirmèrent les prévisions de Newton. Clairaut (1713-1765), célèbre par sa précocité (il fut nommé à l’Académie des Sciences à dix-huit ans) calcule les mouvements des planètes, prévoit de façon précise les éclipses. D’Alembert (1717-1768), dont nous aurons encore l’occasion de parler à propos de l’Encyclopédie, est un des créateurs de la mécanique ; ses œuvres mathématiques comptent parmi les plus considérables de son siècle. Maupertuis, célèbre par son expédition en Laponie, développe, lui aussi, la mécanique ; le prestige de la science mathématique française est assez grand pour que le roi de Prusse, Frédéric II, lui demande de venir à Berlin diriger l’Académie qu’il vient de créer à l’imitation de celle de Paris. Enfin, Lagrange (1738-1813), un des plus grands mathématiciens de tous les temps, complète cette magnifique floraison de l’esprit scientifique français. L’astronomie, elle aussi, est en plein essor, et pendant un siècle, la direction de l’Observatoire de Paris sera entre les mains d’une famille, les Cassini, qui, en dehors des observations astronomiques, dressera la carte détaillée de la France, la première ayant eu cette ampleur, et qui servira par la suite de modèle aux autres pays.


Développement des sciences de la nature

La physique fait un grand nombre de progrès ; on se passionne pour l’électricité dont on étudie les propriétés ; la foule se presse aux cours publics qui s’ouvrent un peu partout et où l’on présente les expériences les plus curieuses. Mais, c’est surtout la chimie qui devait faire un progrès absolument décisif avec l’un des plus grands savants du XVIIIe siècle, Lavoisier. Lavoisier (1743-1794) n’était pas un professionnel de la science, mais, riche, il s’intéressa