Page:Somme contre les Gentils.djvu/55

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existe un être plus grand que tout ce qu’on peut concevoir dans la nature.

Il n’est pas nécessaire non plus, comme le voudrait la seconde raison, que l’on puisse concevoir quelque chose de plus grand que Dieu, s’il est possible de le concevoir non existant. En effet, qu’on puisse le concevoir n’existant pas, cela ne provient ni de l’imperfection de son être, ni du défaut de certitude, puisque son existence est évidente en elle-même, mais de la faiblesse de notre esprit qui, ne pouvant le voir en lui-même, le découvre seulement dans ses effets ; c’est pourquoi il parvient à le connaître par le raisonnement.

Le même principe sert à résoudre le troisième argument. De même que pour nous il est évident par soi-même que le tout est plus grand que sa partie, ainsi l’existence de Dieu est évidente par elle-même pour ceux qui voient l’essence divine, puisque son essence ne diffère pas de son être. Mais parce que nous ne pouvons pas voir son essence, nous parvenons à connaître son existence, non par elle-même, mais par ses effets.

La réponse à la quatrième raison se présente d’elle-même, L’homme connaît naturellement Dieu, de la même manière qu’il le désire naturellement. Or, l’homme le désire naturellement en tant qu’il désire naturellement la béatitude, qui est une sorte de ressemblance de la divine bonté. Ainsi, il n’est pas nécessaire que Dieu, considéré en lui-même, soit naturellement connu de l’homme, mais seulement sa ressemblance. Il faut donc que l’homme arrive à le connaître par le raisonnement, et au moyen des ressemblances qu’il aperçoit dans ses effets[1].

  1. Saint Thomas, en disant que l'homme desire naturellement la béatitude, qui est comme une image de Dieu, et qu'il connaît ainsi Dieu dans son image, ne l'entend pas