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Page:Sonnerat - Voyage aux Indes orientales et à la Chine, tome 2.djvu/49

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ET A LA CHINE. Liv. IV.

l’intérêt & de la politique du Conquérant, de ne point réformer ce qui plaît : au Peuple qu’il a fournis, sur-tout quand tout est à son avantage.

Les ans & les sciences ne feront jamais de progrès à la Chine ; le Gouvernement y mettra toujours obstacle, parce- que si le Peuple venoit à s’éclairer, il faudroit nécessairement en changer la forme : aussi les plus érudits commencent à peine à savoir lire & écrire à la fin de leur vie. Leur science & leur habileté consistent dans des difficultés vaincues, & le Gouvernement ne paroît tranquille, que parce qu’il régit des hommes lâches.

Cette Nation, quoique très-ancienne, ne cherche point à réformer ses abus ; les hommes n’ont point de génie, point d’activité dans l’imagination, tout se fait machinalement ou par routine. Les Voyageurs s’accordent assez sur cet article ; si l’on dépouille leurs ouvrages de l’enthousiasme, on verra qu’ils ne font consister l’industrie Chinoise que dans des bagatelles : le Chmois riche n’est pas même cultivateur ; tout ce que l’on raconte à ce sujet est faux. Il passe la moitié de sa vie à connoître les caractères innombrables de sa langue, & l’autre moitié dans son sérail. On ignore dans ce pays jusqu’à la manière de transplanter les arbres, de les couper & de les greffer : leurs jardins ne ressemblent à rien ; ils n’offrent pas même d arbres fruitiers, à moins qu’ils ne s’y trouvent plantés par la Nature. On est bien éloigné d’y trouver, comme dans les jardins Européens, les plantes des quatre parties du monde : un rocher factice, un petit pont, un belvéder & quelques labyrinthes, en font tout l’ornement. Cette agriculture si vantée se réduit à planter du riz, qu’un malheureux enfoncé dans l’eau