Page:Sophocle, trad. Leconte de Lisle, 1877.djvu/110

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contre. Le conducteur du char et le vieillard lui-même voulurent m’écarter violemment du chemin. Alors, plein de colère, je frappai le conducteur qui me repoussait. Mais le vieillard, me voyant passer à côté du char, saisit le moment et me frappa le milieu de la tête de son double fouet. Il ne souffrit pas un mal égal, car, aussitôt atteint du bâton que j’avais en main, il roula à la renverse du haut de son char ; et je tuai aussi tous les autres. Si cet homme inconnu a quelque chose de commun avec Laios, qui, plus que moi, peut être en horreur aux Dieux ? Nul, étranger ou citoyen, ne me recevra, ni ne me parlera ; et chacun me chassera de ses demeures ; et personne autre que moi-même ne m’accablera de mes propres imprécations ! Et mes mains, par lesquelles il a péri, souillent le lit du mort ! Ne suis-je pas un scélérat impur, puisqu’il faut que je m’exile et fuie sans revoir les miens et sans remettre le pied sur la terre de la patrie ? Sinon, je dois me marier avec ma mère et tuer mon père. Ne penserait-il pas sagement celui qui dirait que cette destinée m’a été faite par un Daimôn inexorable ? Ô sainteté du Dieu ! que je ne voie point ce jour ! Que je disparaisse du milieu des mortels avant d’être souillé d’une telle horreur !

LE CHŒUR.

Ces choses, ô Roi, nous frappent de terreur ; mais, jusqu’à ce que tu saches tout de celui qui était présent, ne désespère pas.

OIDIPOUS.

Certes, l’attente où je suis de ce bouvier est le seul espoir qui me reste.

IOKASTÈ.

D’où vient que tu seras rassuré quand il sera ici ?