Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/121

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LE CHŒUR.
Seigneur, voici Créon ; la nation thébaine

Vient de lui confier la garde souveraine
Du royaume ; il peut seul ou seconder tes vœux,
Ou t’accorder encor ses conseils généreux ;
C’est à lui que tu dois adresser ta prière.

ŒDIPE.
Pour moi, dites, Thébains, que pourrait-il donc faire ?

Injuste à ton égard, si coupable jadis !
Oui, sans doute, Créon ! frère, tu me maudis !


Scène III.

LES MÊMES, CRÉON.
CRÉON.
Ne crois point qu’à des maux que mon âme déplore

Je voudrais insulter pour les accroître encore,
Œdipe, je te plains... Quant à vous, ô Thébains !
Si vous ne craignez pas les regards des humains,
Ah ! respectez au moins cette pure lumière
De l’astre qui vous voit et féconde la terre[1].
Rougissez d’exposer au dedans de ces murs,
Voilez à tous les yeux des objets trop impurs ;
La terre ne peut plus porter cette victime
Que poursuivent les Dieux d’un courroux légitime ;
L’eau ne peut l’arroser, et la clarté du ciel
Ne doit plus éclairer ce profane mortel.

  1. Créon s’adresse aux Thébains et dit : Si (après ces horribles événements) vous ne respectez plus les choses et les races humaines, vénérez du moins encore la sainte lumière du soleil de ce Dieu qui nourrit tout, et ne lui exposez point un objet impur et maudit comme ce malheureux qui vous a parlé.
    Rattalerus, Giustiniano et Boivin ont suivi ce sens, dont la suite prouve la vérité. Dacier adopte un sens forcé : « Respectez cette vive lumière du soleil qui éclaire la terre et qui nous a montré la victime ! »