Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/34

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Si l’on peut en attendre une agréable issue[1].

ŒDIPE.
Que dites-vous ?... Mon âme à ces mots est émue ;

Sans exciter ma crainte, ils m’ont pourtant troublé.

CRÉON.
Faut-il devant le peuple en ces lieux assemblé,

M’expliquer sur-le-champ, ou vous suivre en l’enceinte
De ce palais.

ŒDIPE.
Parlez devant tous et sans crainte ;

Je prends au sort du peuple un trop vif intérêt.

CRÉON.
Je vais donc d’Apollon vous révéler l’arrêt :

L’oracle a déclaré, d’une voix sans mystère,
Qu’il faut d’un monstre impur délivrer notre terre ;
Il porte dans nos murs la désolation.

ŒDIPE.
Comment faire à ce Dieu cette expiation ?


CRÉON.
Par l’opprobre, l’exil ou la mort du coupable ;

Par le sang seul, dit-il, le sang est réparable.

ŒDIPE.
Mais de ce Dieu quel sang enflamme le courroux ?


CRÉON.
Prince, le sang d’un roi qui régnait avant vous,

Laïus était son nom[2].

  1. C’est le sens littéral, expressément vague et ambigu. Créon, qui ne sait pas s’il doit s’expliquer devant le peuple, trouve le moyen de répondre sans rien dire : il excite ainsi la curiosité et l’attention. « Si les malheurs (c’est-à-dire, la cause des malheurs) sont écartés, dit-il, tout ira bien. »
    Ce n’est point là la réponse de l’oracle, mais la pensée de Créon, qui en interprète le sens. Quant aux paroles mêmes de la réponse d’Apollon Pythien, elles sont rapportées un peu plus loin.
  2. Laïus, roi de Thèbes, fils de Labdacus, a donné son nom à la race des Labdacides. Labdacus était petit-fils de Cadmus, fils d’Agénor et de Téléphane. Polydore, fils de Cadmus et d’Harmonie, succéda à son père.