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NOTICE
SUR LES TRACHINIENNES.




G. Schlegel a porté sur les Trachiniennes un jugement très-sévère et très-hasardé : cette pièce lui paraît si inférieure aux autres tragédies de Sophocle, qu’il est tenté de l’attribuer plutôt à son fils Iophon. Quant à l’authenticité des Trachiniennes, elle ne saurait être révoquée en doute. Sans parler du témoignage irrécusable de Cicéron, Tuscul., 1. II, c. 8, qui en a même traduit un long fragment, le célèbre morceau des plaintes d’Hercule, il est impossible de ne pas reconnaître la touche de Sophocle au style et aux qualités poétiques qui brillent, sinon au même degré que dans ses autres ouvrages, du moins assez généralement pour n’être pas indignes du grand tragique.

La jalousie de Déjanire, et la mort d’Hercule, qui périt pour avoir revêtu la robe teinte du sang du centaure Nessos, que son épouse lui avait envoyée, dans l’espoir de recouvrer son amour par ce filtre puissant, tel est le sujet de la pièce. Les jeunes filles de Trachine, amies et compagnes de Déjanire, qui composent le Chœur, ont donné leur nom à cette tragédie.

La marche de l’action est très-simple, elle se développe facilement et de la manière la plus naturelle, sans incidents extraordinaires, et cependant elle n’est pas dépourvue d’art. Tous les événements sortent du caractère des personnages, ou plutôt du personnage principal, de Déjanire. Toutefois, l’ordonnance du drame n’est point irréprochable : le défaut le plus grave qu’on y peut reprendre porte sur le double intérêt qui se partage successivement les spectateurs ; d’où vient que les critiques ont beaucoup discuté pour savoir quel est précisément le sujet de la tragédie, ou la mort d’Her-