Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/468

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LE CHŒUR.

Quelle nouvelle, ô vieille, nous apportes-tu ?

LA NOURRICE.

Déjanire a, sans faire un pas, terminé le dernier des voyages[1].

LE CHŒUR.

Ce n'est assurément pas sa mort que tu nous annonces ?

LA NOURRICE.

J’ai tout dit.

LE CHŒUR.

L infortunée est-elle morte ?

LA NOURRICE.

Je le répète.

LE CHŒUR.

Ah ! malheureuse ! de quelle manière dis-tu qu’elle a péri ?

LA NOURRICE.

De la manière la plus triste, si l'on songe à l’acte même.

LE CHŒUR.

Dis-moi, femme, quelle fin a terminé sa vie ?

LA NOURRICE.

Elle-même s’est donné la mort.

LE CHŒUR.

Quel délire ou quel mal a causé la mort de cette femme, instrument d’un trépas funeste[2] ? Comment a-t-elle pu seule accomplir le dessein d'ajouter sa mort à une autre mort ?

LA NOURRICE.

Par le tranchant d’un fer cruel.

LE CHŒUR.

Tu as vu, malheureuse, ce spectacle horrible ?

  1. Littéralement : « Elle est partie pour le dernier des voyages, d’un pied immobile »
  2. Le Chœur appelle ici Déjanire αἰχμᾷ βέλεος κακοῦ, la pointe d'un trait funeste, parce qu'elle a donné la mort à Hercule, au moyen de cette tunique teinte du sang du Centaure, empoisonnée par la flèche du héros.