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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/133

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est toute récente en son village de certaines folies qui se sont passées, parmi lesquelles on m’a mêlé, je m’y retournerais, et ferais, je m’assure, plus par mes soumissions et par mes témoignages d’amour que vous et votre beau financier par l’argent, sur qui vous fondez toute votre espérance. Ira-t-elle aimer un sot, dont elle verra les pistoles plutôt que la personne même qui, je m’assure bien n’a aucun mérite, puisqu’en un mot c’est un financier ?

— Ha ! mon ami Francion, reprit Agathe, vous savez bien quelle puissance je vous ai dit que l’argent a sur l’esprit de Laurette.

— Oui, mais elle est femme, repartit Francion, et n’est pas insensible aux plaisirs qu’on reçoit avec une personne dont le mérite est agréable. Il se peut bien faire que pour attraper quelques ducats, elle se laissera en proie aux désirs d’un badaud, mais elle ne le chérira pas pourtant, et quand elle verra sa bourse vide, elle se videra pareillement de l’affection qu’elle aura feint de lui porter. Faites du pis que vous pourrez, Agathe : aussitôt que le moule de mon timbre sera guéri de sa plaie, j’irai voir secrètement ma maîtresse et recevrai d’elle tout ce que je saurais désirer. »

Ce discours fini, Agathe prit congé de la compagnie et monta dans une charrette, où elle avait fait tout son voyage ; puis elle se mit au chemin de la demeure de sa nièce, envers qui elle n’avait pas envie de faire la chose dont elle avait menacé Francion. Car elle s’était résolue de le secourir entièrement sans qu’il s’en aperçut, et de donner de la casse au financier.

FIN DU SECOND LIVRE