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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/37

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descendre. Il se glissa le plus bas qu’il put le long de la corde, qui n’était pas assez longue pour le mener jusques à terre ; et, par hasard, en passant par devant une fenêtre qui était remparée d’un treillis de fer, il y demeura attaché par son haut-de-chausse qui fut traversé d’un barreau si pointu où il s’empêtra si bien, qu’il lui fut impossible de s’en retirer.

Sur ces entrefaites, Francion, ne voulant pas manquer à l’assignation que sa maîtresse lui avait donnée, s’était approché du château, et, ayant vu d’un autre côté Catherine à une fenêtre, il crut que c’était Laurette. Il fut prompt à monter jusques en haut et se mit à baiser cette servante :

— Qui est-ce ? lui dit-elle. Est-ce toi, Olivier, ou un autre ? Es-tu fou de faire tant de sottises en un temps où il nous faut songer soigneusement à nos affaires ? Laisse moi aller aider à monter à tes compagnons. Crois-tu qu’avec l’habit que j’ai, j’aie aussi pris le corps d’une fille ?

Francion qui avait déjà connu qu’il se méprenait, en fut encore rendu plus assuré par ces paroles, qu’il oyait bien être pas proférées par la bouche agréable de Laurette. Il ne s’amusa guère à chercher ce qu’elles voulaient signifier, parce qu’il s’imaginait qu’il n’y avait point d’intérêt. Seulement, il dit à Catherine, qu’il reconnaissait pour la servante, que sa maîtresse lui avait accordé qu’il passerait cette nuit-là avec elle, et qu’il était venu pour jouir d’un si précieux contentement. Catherine, qui avait autant de finesse qu’il en faut à une personne qui exerce le métier dont elle faisait profession