Page:Sorel - La Vraie histoire comique de Francion.djvu/320

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Abhorrez cette folie,
Qui vient de mélancolie,
Et ne cherchez seulement
Que votre contentement.
Que les ris joints aux œœillades,
Les baisers, les accolades,
Et les autres jeux d’amour,
Vous occupent nuit et jour.
Poussé de douce manie,
Il faut que chacun manie
Le sein de ces Nymphes-ci,
Pour apaiser son souci.
Leur humeur n’est point farouche,
Elles ouvriront leur bouche,
Plutôt pour vous en prier,
Qu’afin de vous en crier.
Abordez-les donc sans crainte,
Et dès la première plainte,
Vous serez récompensés
De vos services passés.
Quand de semblables délices
Viennent après les supplices,
Notre âme a tant de plaisirs,
Qu’elle n’a plus de désirs.
Les langueurs, les rêveries,
Avec les chaudes furies,
Et la douce pâmoison
Agitent notre raison.
Ha ! mon Dieu, que j’ai d’envie
De pouvoir finir ma vie
Au fort d’un si doux combat,
Pour mourir avec ébat.

Cette chanson, que les musiciens reprenoient sur leurs luths, après que Francion en avoit récité un couplet, ravit les esprits de toute l’assistance : il y avoit une cadence si bouffonne et si lascive, qu’avec les paroles, qui l’étoient assez, elle convia tout le monde aux plaisirs de l’amour. Tout ce qui étoit dans la salle soupiroit après les charmes de la volupté ; les flambeaux mêmes, agités à cette heure-là par je ne sçais