Page:Sorel - Le Berger extravagant, seconde partie, 1627.djvu/86

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ton cœur a blessé le mien pareillement. Je fus si estonné que je devins presque aussi insensible qu’une souche. Zenocrite me remit le voile sur la teste, et m’asseurant que son charme estoit achevé, me reconduisit chez luy, sans que je luy parlasse en façon du monde. Je ne pouvois sçavoir au vray si c’estoit une nymphe que j’avois veuë, ou ma representation seulement ; les habits dont j’estois vestu me faisoient soupçonner la tromperie, mais aussi la voix que j’avois entenduë me faisoit croire quelque chose de veritable. Estant dans la chambre obscure de Zenocrite, il m’osta les habits de fille et me remit ceux de garçon : mais encore que je sentisse tout cela, je n’eus pas le courage de l’accuser d’imposture. Ma consolation estoit que tousjours m’avoit il donné