Aller au contenu

Page:Sorel - Le Berger extravagant, troisième partie, 1628.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

aïs ; y a-t’il quelque paysan qui n’en puisse dire autant ? Tout homme qui sçait parler le peut bien faire, car la raison nous dicte cela mot pour mot, sans chercher du secours dans la philosophie, et sans orner son langage par les fleurs de rhetorique. Il y en a assez qui se servent d’exemples tirez d’Homere pour des discours moraux et politiques, comme de dire qu’Agamennon souhaitoit d’avoir dix Nestors, que Diomede souhaittoit un compagnon pour accomplir son entreprise, et autres choses pareilles. Ils apliquent cela diversement à leurs sujets : mais qu’est-ce que cela peut faire à sa recommendation ? Y a-t’il là quelque chose de si esmerveillable ? Les moindres choses du monde peuvent estre ainsi apropriees. L’on me remonstrera que quand Homere ne seroit pas estimé pour le langage, il le devroit estre tousjours pour les preceptes excellens qu’il donne aux gens de guerre, et que les lacedomiens qui ne s’adonnoient qu’aux armes disoient que c’estoit leur vray poëte, mais qu’Hesiode qui ne traittoit que de choses champestres n’estoit que le poëte des ilotes leurs esclaves. Les pedans ne manqueront pas aussi de me representer