Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/102

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mes qui ont fait leurs preuves comme penseurs peuvent accumuler des sophismes en vue de donner une apparence raisonnable aux rêveries de personnages grossiers qui ne pensent pas.[1] Cette question tourmente fort les amis de Jaurès, qui traitent volontiers de démagogues les représentants de la nouvelle école et les accusent de chercher les applaudissements de masses impulsives.

Les socialistes parlementaires ne peuvent comprendre les fins que poursuit la nouvelle école ; ils se figurent que tout le socialisme se ramène à la recherche des moyens d’arriver au pouvoir. Les gens de la nouvelle école voudraient-ils, par hasard, faire de la surenchère pour capter la confiance de naïfs électeurs et subtiliser les sièges aux socialistes nantis ? L’apologie de la violence pourrait encore avoir un très fâcheux résultat, en dégoûtant les ouvriers de la politique électorale, ce qui tendrait à faire perdre leurs chances aux candidats socialistes, en multipliant les abstentions ! Voudrait-on faire revivre les guerres civiles ? Cela paraît insensé à nos grands hommes d’état.

La guerre civile est devenue bien difficile depuis la découverte des nouvelles armes à feu et depuis le percement des voies rectilignes dans les métropoles[2]. Les

  1. Il paraît que c’est en ces termes que l’on parle du mouvement prolétarien dans le beau monde du socialisme raffiné.
  2. Cf. les réflexions d’Engels dans la préface à la réédition qu’il fit en 1895 d’articles de Marx sous le titre Luttes des classes en France de 1848 à 1850. Cette préface manque dans la traduction française. Dans l’édition allemande il y a une coupure, les chefs de la social démocratie n’ayant pas trouvé certaines phrases d’Engels suffisamment politiques.