Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


II


Il nous faut maintenant aller plus loin et demander si le tableau fourni par la grève générale est vraiment complet, c’est-à-dire s’il comprend tous les éléments de la lutte reconnus par le socialisme moderne. Mais tout d’abord il faut bien préciser la question, ce qui sera facile en partant des explications données plus haut sur la nature de cette construction. Nous avons vu que la grève générale doit être considérée comme un ensemble indivisé ; par suite, aucun détail d’exécution n’offre aucun intérêt pour l’intelligence du socialisme ; il faut même ajouter que l’on est toujours en danger de perdre quelque chose de cette intelligence quand on essaie de décomposer cet ensemble en parties. Nous allons essayer de montrer qu’il y a une identité fondamentale entre les thèses capitales du marxisme et les aspects d’ensemble que fournit le tableau de la grève générale.


Cette affirmation ne manquera pas que de paraître paradoxale à plus d’une personne ayant lu les publications des marxistes les plus autorisés. Il a existé, en effet, pendant très longtemps, une hostilité fort déclarée dans les milieux marxistes contre la grève générale. Cette tradition a beaucoup nui aux progrès de la doctrine de Marx ; et ce n’est pas le plus mauvais exemple que l’on puisse prendre pour montrer que les disciples tendent, en général, à restreindre la portée de la pensée magistrale.