constituent un très grand obstacle au maintien de la notion de lutte de classe. Le monde a toujours vécu de transactions entre les partis et l’ordre a toujours été provisoire ; il n’y a pas de changement, si considérable qu’il soit, qui puisse être regardé comme impossible dans un temps comme le nôtre, qui a vu tant de nouveautés s’introduire d’une manière imprévue. C’est par des compromis successifs que s’est réalisé le progrès moderne ; pourquoi ne pas poursuivre les fins du socialisme par des procédés qui ont si bien réussi ? On peut imaginer beaucoup de moyens propres à donner satisfaction aux désirs les plus pressants des classes malheureuses. Pendant longtemps ces projets d’amélioration furent inspirés par un esprit conservateur, féodal ou catholique ; on voulait, disaient les inventeurs, arracher les masses à l’influence des radicaux. Ceux-ci, menacés dans leurs situations, moins par leurs anciens ennemis que par les politiciens socialistes, imaginent aujourd’hui des projets pourvus de couleurs progressives, démocratiques, libre-penseuses. On commence enfin à nous menacer de compromis socialistes !
On ne prend pas toujours garde à ce que beaucoup d’organisations politiques, de systèmes d’administration et de régimes financiers peuvent se concilier avec la domination d’une bourgeoisie. Il ne faut pas toujours attacher grande valeur à des attaques violentes formulées contre la bourgeoisie ; elles peuvent être motivées par le désir de réformer le capitalisme et de le perfectionner[1]. Il
- ↑ Je connais, par exemple, un catholique fort éclairé qui manifeste avec une singulière acrimonie son mépris pour