Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/400

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les plus grands conflits qui aient jamais existé entre l’Église et l’État, force à comparer les rapports normaux qui existent entre les deux pouvoirs, à ceux qui existent entre deux couronnes indépendantes.


L’ancienne doctrine de l’harmonie se trouve donc être devenue aussi chimérique, aux yeux des historiens modernes, que peut l’être celle des États-Unis d’Europe ; ce sont deux conceptions du même genre, ayant pour but de remplacer le fait de la paix accidentelle par la théorie d’une union normale. On disserte, de temps à autre, après boire dans des congrès de farceurs sur les États-Unis d’Europe ; mais aucune personne sérieuse ne s’occupe de ces balançoires.

Pendant longtemps les auteurs laïques ont examiné les affirmations du pouvoir papal, formulées pendant les querelles du Sacerdoce et de l’Empire, plutôt à un point de vue juridique qu’à un point de vue historique. Les légistes français avaient trouvé absurdes des thèses qui auraient rendu impossible l’ordre royal dont ils étaient les principaux représentants ; ils avaient posé les principes gallicans en vue de restreindre les prétentions ultramontaines dans des limites compatibles avec les principes de l’administration civile ; les historiens étaient disposés à traiter de paradoxes extravagants les choses que les légistes condamnaient avec tant de rigueur. Mais aujourd’hui on ne s’occupe plus de savoir dans quelle mesure les papes pouvaient avoir raison en droit et comment on aurait pu appliquer leurs théories dans la pratique ; on veut connaître quelles relations existent entre ces affirmations de l’autorité ecclésiastique et le