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V


La situation actuelle du catholicisme en France offre d’assez remarquables ressemblances avec celle du prolétariat engagé dans la lutte de classe pour que les syndicalistes aient un réel intérêt à suivre attentivement l’histoire ecclésiastique contemporaine. De même que dans le monde ouvrier on rencontre nombre de réformistes qui se regardent comme étant de grands savants en science sociale, le monde catholique abonde en hommes pleins de mesure, à ce qu’assurent leurs amis, très au courant du savoir moderne, connaissant les besoins de leur siècle, qui rêvent paix religieuse, unité morale de la nation, compromis avec l’ennemi. L’Église n’a pas les mêmes facilités que les syndicats pour écarter les mauvais conseillers.

Renan a fait remarquer que la recrudescence des persécutions romaines provoquait une recrudescence des idées sur l’apparition de l’Antéchrist[1], et par suite de toutes les espérances apocalyptiques relatives au règne du Christ ; on peut donc comparer ces persécutions aux grandes grèves violentes qui donnent une si extraordinaire importance aux conceptions catastrophiques. Nous ne verrons plus de notre temps les atrocités qui furent commises durant les premiers siècles de notre ère ; mais Renan a, très justement encore, regardé les monastères comme propres à remplacer le martyre[2], Il n’est pas

  1. Renan, Marc-Âurèle. p. 337.
  2. Renan, op. cit., p. 358.