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le vampire.

ter de son père, elle remonta seule dans ses appartements où on entendit peu à peu dans le lointain se perdre les éclats d’une rage mal contenue.

Rentré dans sa chambre, le duc renvoya ses gens, s’assit à son secrétaire et écrivit d’une main ferme les lignes suivantes :

« Monsieur,

« Je ne souillerai pas ma plume à qualifier votre conduite. Tout est fini entre nous. Je vous regardais comme mon fils ; comme père, je vous maudis ! Si vous avez perdu la raison, je vous plains ; sinon, je vous offre ma poitrine et vous tends mon épée.

« Duc de Firstland. »

Quand il eut plié et cacheté le papier, il appuya sa tête blanche dans ses mains. Il pleura.

— Tristes jours, fatales heures qui éclairez et sonnez mes vieux ans, je vous reçois sans blasphèmes. Ma géhenne est sur cette terre, et la tombe me délivrera, Hélas ! tout ce que j’ai aimé m’a quitté !… Les têtes qui devaient me regarder tomber se sont inclinées avant moi, et toujours je me retrouve seul avec mes souvenirs, avec une tombe, avec Dieu !… Mes premières affections où êtes-vous ?… Hélas ! broyées par le temps et envolées en poussière !… Je croyais encore à celui-là. Je me disais avec confiance : ce sera mon fils. Seul, orphelin, il aimera un vieux père ; et me voilà trahi, abandonné, accablé sous le faix d’une insulte !… Seul, seul, je suis seul à pleurer !… Comme le vieil Ossian, notre Homère, je les vois tous tomber autour de moi !… Ah ! mon Dieu, c’est ma prière, écartez de moi les affections terrestres, purgez mon cœur de tout attachement