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le vampire.

veux seuls avaient conservé leur beauté et dominaient sa tête comme un turban de sultane.

Il était dix heures. Par instants, cette jeune personne réprimait d’involontaires bâillements. Elle ne baillait pas d’ennui. — Devant ses yeux, sur la table, était placée une carte, sur laquelle apparaissaient quelques lignes au crayon. Ses grands yeux bleus ne se détachaient pas de ce nom. Cette bouche, qui, peut-être avait désappris à sourire, dessinait cependant une ligne adoucie, et parfois son sein se soulevait en aspirations secrètes. Peu à peu cette tête se pencha lentement, et la bouche vint se placer sur ces lignes crayonnées. Elle demeura ainsi un moment prosternée, puis, quand elle se redressa, sa physionomie se recouvrit d’une expression confuse et rougissante.

— C’est bien lui !… murmura-t-elle. Hélas ! pourvu qu’il ne m’ait point reconnue !…

Mais un bruit familier, sans doute, se fit entendre à l’extérieur. La carte disparut. La porte s’ouvrit. Un homme entra.

Ce second personnage de haute taille, d’une constitution maigre et forte, pouvait avoir de quarante à cinquante ans. Sa figure sèche portait une expression plus austère que triste, et s’éclairait d’un coup-d’œil indéfinissable.

— Vous êtes sorti de bonne heure, ce matin, Antarès. — Dit la jeune fille d’un ton affectueux.

Celui-ci s’approcha d’elle, et avant de répondre lui donna un baiser au front.

— Hélas ! ma pauvre Ophélia, dit-il en anglais, inutilement !… J’ai frappé à bien des portes, je me suis adressé à bien des cœurs, mais sans succès !… N’importe, je te sauverai, je le veux, je me le suis juré !…