Page:Sorr - Le vampire, 1852.djvu/81

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
77
le vampire.

sûre. Le choix de cette retraite était le côté grotesque du drame.

En effet, dans ces circonstances, ce n’est pas chose facile à trouver. Les rideaux des croisées n’étaient pas tombés. Et, d’ailleurs, par cette belle soirée de lune, l’esprit rêveur d’une femme n’aime-t-il pas avant le sommeil à penser en silence aux émotions du jour. Puis, surtout, il voulait rester debout, car s’il devait être découvert il tenait du moins à ce qu’on le trouvât dans une position digne. Il est peu probable, en effet, qu’une femme cède à un amant qui lui apparait sous un lit d’où il sort péniblement, tout poussiéreux, et n’ayant pas le loisir et les facilités de la réplique. Il est impossible encore qu’elle retienne son rire devant celui qu’elle trouvera accroupi, ratatiné ou aplati comme un squelette d’anatomiste dans un placard. Or, en amour, le rire n’est pas de bon augure. Robert comprenait tout cela. Ainsi, après avoir plusieurs fois fureté tous les recoins et tourné autour de tous les meubles, il s’arrêta devant la tenture d’une porte paraissant fermée depuis longtemps.

Le jeune homme, ainsi caché, demeura près d’une heure à attendre. Pendant ce temps il comprit en frémissant tous les inconvénients de sa position scabreuse, et réfléchit sérieusement de combien peu de chose dépendait sa sûreté. La cause la plus futile, pouvait inspirer le soupçon. Un craquement de sa chaussure, un éternuement, un borborygme d’estomac, une tentation de toux. Mais minuit sonna. Et pendant qu’il s’occupait encore à pressentir toutes ces craintes et à conjurer tous ces accidents, la porte s’ouvrit et l’appartement s’éclaira. Une femme de chambre entra.