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Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/309

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et, m’adressant avec force à mon père, je répondis :

« — Vous m’avez demandé si j’étais coupable ; coupable de quel crime ? coupable d’aimer M. Lannois, c’est vrai ; coupable de le lui avoir dit, c’est vrai ; coupable d’avouer qu’il m’aime, c’est vrai. S’il y a des crimes au delà de ceux-ci, je les ignore.

« Aussitôt je sortis du salon, mécontente envers tous de ce que je n’avais trouvé que des visages sévères et accusateurs lorsque le bonheur de ma vie venait d’être brisé, désespérée en moi seule de la profondeur de peine où je me sentais tomber, comprenant par la douleur cet amour que j’avais compris par la joie : amour immense, amour qui était le centre de ma vie, ou qui la tuera ou me rendra folle si on l’en arrache ! Cependant la colère se mêlait à mon désespoir. N’avoir pas trouvé un mot de pitié dans tout ce monde qui m’entourait et qui était heureux, cela m’irritait. J’accusais autant que j’étais accusée, lorsqu’un incident inouï vint pousser ce sentiment